Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/230

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jardin, entouré d’un mur en pierre, orné de statues, et au milieu duquel on voyait une fontaine artificielle : ses tristes parterres s’étendaient sur un des côtés de la cour, avec laquelle ils communiquaient par un portail bas et arqué. Dans cette étroite enceinte, Marie Stuart apprenait alors le rôle pénible de prisonnière, rôle qu’elle était condamnée à jouer toute sa vie, sauf un bien petit intervalle. Deux suivantes l’accompagnaient dans sa promenade mélancolique ; mais le premier regard que Roland jeta sur une femme si illustre par sa naissance, si célèbre par sa beauté, par ses talents et ses malheurs, ne lui permit d’apercevoir que la présence de la malheureuse reine d’Écosse. Sa taille et sa figure ont été si profondément empreintes dans tous les souvenirs que, même après environ trois siècles, il est inutile de rappeler au lecteur le moins instruit les traits caractéristiques de cette physionomie remarquable, qui réunit tout ensemble ce qu’on peut se figurer de majestueux, d’agréable et d’éclatant, en laissant douter si ce brillant ensemble convenait mieux à la royauté, à la grâce ou aux talents. Quel est l’homme qui, entendant le nom de Marie Stuart, n’a pas son portrait sous les yeux, aussi familier à sa mémoire que celui de la maîtresse de son adolescence, ou de la fille favorite de son âge mûr ? Ceux mêmes qui se sentent forcés à croire tout ou beaucoup de ce que ses ennemis ont avancé pour la perdre, ceux-là ne peuvent penser sans un soupir à cette physionomie qui exprimait tout autre chose que les crimes infâmes dont elle a été accusée pendant sa vie, et qui continuent, sinon à noircir sa mémoire, du moins à l’obscurcir. Ce front si ouvert et si noble… ces sourcils si régulièrement gracieux, animés par le bel effet des yeux brun-clair qu’ils ombrageaient, et qui semblaient dire tant de choses… ce nez, formé avec toute la précision des contours grecs… cette bouche si bien proportionnée, et comme destinée à ne prononcer que de tendres paroles… ce menton à fossette… ce cou blanc et majestueux comme celui du cygne… tous ces traits composaient une physionomie dont nous savons que le modèle ne saurait avoir existé dans aucun autre personnage connu parmi ces sommités du monde social qui commandent une attention générale et sans partage. Eh vain dira-t-on que les portraits qui existent de cette femme remarquable ne se ressemblent pas entre eux. Dans la différence même qu’on y remarque, chacun d’eux offre des traits généraux que l’œil reconnaît sur-le-champ comme appartenant à l’être que