Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/241

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temps comte de Bothwell, et à qui on donna le sobriquet de duc d’Orkney, offrit de se battre en personne avec tous les nobles ligués pour le livrer à la justice. J’acceptai son défi ; et ce fut alors que le noble comte de Morton me fit don de cette bonne épée pour le combattre. Avec le secours du ciel, si Bothwell avait eu un grain de plus de présomption, ou un grain de moins de lâcheté, j’aurais fait tant de besogne au moyen de cette excellente lame sur la carcasse de ce traître, que les chiens et les vautours auraient trouvé leurs morceaux coupés avec un goût exquis. »

La reine perdit presque tout son courage quand elle ouït prononcer le nom de Bothwell, nom lié à une horrible série de crimes, de honte et de désastres. Mais Lindesay ayant donné carrière à son langage plein d’insolence et de présomption, cette circonstance laissa à la reine le temps de se remettre, et de lui répondre avec un ton mêlé tout à la fois de froideur et de mépris :

« Il est aisé de terrasser un ennemi qui ne prend point part au combat. Mais si Marie Stuart avait hérité de l’épée de son père aussi bien que de son sceptre, les plus hardis rebelles ne se plaindraient pas aujourd’hui de ne pas en avoir à combattre. Votre seigneurie me pardonnera si j’abrège cette conférence. La courte description d’un combat sanglant suffit pour satisfaire la curiosité d’une femme ; et à moins que milord Lindesay n’ait quelque chose de plus important à nous raconter que les hauts faits accomplis par le vieux Bell-the-Cat, à moins, dis-je, qu’il ne veuille nous expliquer comment il les eût égalés lui-même, si le temps et la fortune le lui eussent permis, il trouvera bon que nous nous retirions dans notre appartement ; et vous, Fleming, suivez-nous, et venez nous achever la lecture des Rodomontades espagnoles.

— Demeurez, madame, » dit en rougissant Lindesay ; « la finesse de votre esprit m’est depuis long-temps trop bien connue pour que j’aie songé à préparer une entrevue dans le seul but de faire briller cet esprit aux dépens de mon honneur. Lord Ruthven et moi-même, de concert avec sir Robert Melville, nous nous sommes rendus de la part du conseil secret près de Votre Seigneurie pour l’entretenir de certaines mesures qui importent à la sûreté de votre propre vie et à la prospérité de l’État.

— Le conseil secret ! s’écria la reine : et de quel droit peut-il exister ou agir, tandis que moi, de qui seule il devrait tenir ses pouvoirs, je gémis sous le joug d’une injuste captivité ! Peu importe cependant ; rien de ce qui concerne le bonheur de l’Écosse