Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/334

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d’avoir dans cette cheminée un ou deux fagots de ces mêmes épines que la dame de Lochleven sait si bien décrire : il me semble que l’air humide de ce lac, qui n’abandonne point ces chambres voûtées, leur communique un froid mortel.

— On obéira au désir de Votre Grâce, dit la dame de Lochleven ; mais me permettrez-vous de vous rappeler que nous sommes en été ?

— Je vous remercie de l’avis, ma bonne lady, reprit la reine ; car les prisonniers apprennent plutôt le changement des saisons par la bouche de leur geôlier que par ce qu’ils ressentent de leur influence. Encore une fois, Roland Græme, que nous direz-vous de la fête ?

— Elle était assez animée, madame, répondit le page, mais fort ordinaire, et le récit en serait peu digne des oreilles de Votre Altesse.

— Oh ! vous ne savez pas, reprit la reine, combien mon oreille est devenue indulgente pour tout ce qui parle de la liberté et des plaisirs des gens libres. Il me semble que j’aurais mieux aimé voir les joyeux villageois dansant leur ronde autour du mai, que la plus brillante assemblée dans l’intérieur d’un palais. L’absence de murs de pierre, la certitude que ce pied qui foule le vert gazon est libre et sans entraves, voilà qui vaut tout ce que l’art ou la splendeur peut ajouter aux fêtes des cours.

— J’espère, » dit la dame de Lochleven en s’adressant au page à son tour, « qu’il n’y a eu parmi ces folies aucune des querelles et des désordres qui en sont si souvent la suite ? »

Roland jeta un regard furtif sur Catherine Seyton comme pour attirer son attention, et répondit : « Rien n’a troublé la bonne harmonie de la fête, madame, sinon qu’une demoiselle hardie a établi un contact trop familier entre sa main et la joue d’un acteur, exploit pour lequel elle a couru le risque d’être plongée dans le lac. »

En disant ces mots il jeta un coup d’œil à la hâte sur Catherine ; mais elle soutint avec la plus grande sérénité de maintien ce qu’il jugeait ne pouvoir manquer d’exciter en elle quelque crainte et quelque confusion.

« Je ne gênerai pas plus long-temps Votre Grâce par ma présence, reprit la dame de Lochleven, à moins que vous n’ayez quelque chose à me commander ?

— Rien, notre bonne hôtesse, répondit la reine, sinon que