Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/94

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stérile et flétrie de l’Écosse. Que dis-je ? sur l’Écosse ! leurs yeux sont sur nous, Roland, sur la femme frêle, sur le jeune homme sans expérience, qui, parmi les ruines que le sacrilège a faites, se dévouent à la cause de Dieu et de leur souveraine légitime. Amen, ainsi soit-il ! Les yeux bienheureux des saints et des martyrs, qui sont témoins de notre résolution, en verront l’accomplissement ; ou leurs oreilles, qui entendent notre voix, entendront notre dernier soupir consacré à cette cause sainte ! »

Tout en parlant ainsi, elle tenait Roland Græme par une main, tandis que de l’autre elle lui indiquait le ciel, comme pour ne lui laisser aucun moyen de protester contre les vœux qu’elle prononçait à la fois pour elle-même et pour lui. Quand elle eut fini son appel au ciel, elle ne lui laissa pas le temps d’hésiter ni de demander une plus longue explication de ses desseins ; mais revenant avec la même rapidité à ses inquiétudes maternelles, elle l’accabla de questions sur sa résidence au château d’Avenel, et sur les qualités et les talents qu’il avait acquis.

« C’est bien, » dit-elle quand elle eut épuisé ses questions ; « mon bel autour a été bien appris, et il prendra son essor bien haut ; mais ceux qui l’ont dressé auront lieu de s’étonner de son vol et de le craindre. Prenons maintenant, ajouta-t-elle, notre repas du matin, et ne t’inquiète pas de son exiguïté : quelques heures de marche nous mèneront dans un canton plus favorable. »

Ils déjeunèrent effectivement avec les restes du repas de la veille, et se mirent aussitôt en voyage. Madeleine Græme montrait le chemin, d’un pas plus ferme et plus actif que l’âge ne semblait devoir le permettre ; et Roland Græme suivait, pensif, inquiet, et fort peu satisfait de l’état de dépendance auquel il paraissait encore une fois réduit.

« Dois-je donc être à jamais, se disait-il, dévoré du désir de la liberté, et néanmoins forcé par les circonstances à suivre la volonté d’autrui ? »