Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/234

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— J’y vais, milord, » répondit une voix d’en haut. Aussitôt se fit entendre le pas lent d’un homme âgé qui descendait péniblement l’escalier, et Alasco entra dans l’appartement du comte. L’astrologue était un petit homme et paraissait fort avancé en âge ; car sa barbe était blanche et si longue qu’elle descendait sur son pourpoint noir jusqu’à sa ceinture de soie. Ses cheveux étaient aussi blancs que sa barbe ; mais ses sourcils étaient noirs ainsi que les yeux vifs et perçants qu’ils ombrageaient, ce qui donnait un air étrange à la physionomie de ce vieillard. Ses joues étaient encore fraîches et rubicondes, et ses yeux, dont nous venons de parler, ressemblaient à ceux d’un rat pour la vivacité et même la férocité de leur expression. Ses manières ne manquaient pas d’une sorte de dignité ; et l’interprète des astres, quoique respectueux, semblait cependant à son aise, et prenait même un ton d’autorité en conversant avec le premier favori d’Élisabeth.

« Vos prédictions ne se sont pas accomplies, Alasco, dit le comte après avoir échangé un salut avec lui ; « il est convalescent.

— Mon fils, répondit l’astrologue, permettez-moi de vous rappeler que je n’ai pas garanti sa mort ; et puis aucune prédiction ne peut être tirée de l’inspection des corps célestes et de leurs conjonctions, qui ne soit soumise au contrôle de la volonté de Dieu.

À stra regunt hommes, sed regit astra Deus[1].

— De quelle utilité est donc votre science mystérieuse ? demanda le comte.

— D’une grande utilité, mon fils, répondit le vieillard, puisqu’elle peut dévoiler le cours naturel et probable des événements, quoique ce cours soit subordonné à un pouvoir supérieur. Ainsi, en repassant l’horoscope que Votre Seigneurie a soumis à ma science, vous observerez que Saturne étant dans la sixième maison en opposition à Mars, en arrière de la maison de vie, il ne peut que dénoter une longue et dangereuse maladie, dont l’issue dépend de la volonté du ciel, quoique la mort doive probablement s’ensuivre. Cependant si je savais le nom de la personne, je ferais un autre calcul.

— Son nom est un secret ; pourtant, je dois en convenir, ta prédiction n’a pas été entièrement fausse. Il a été malade et dangereusement malade, mais non pas jusqu’à la mort. As-tu de nouveau tiré mon horoscope, ainsi que Varney te l’a ordonné ? Es-tu

  1. Les astres gouvernent les hommes, mais Dieu gouverne les astres. a. m.