Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/319

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Épouse légitime du grand comte de Leicester, le favori d’une reine, idole de l’Angleterre, elle approchait du séjour de son époux et de sa souveraine, sous la protection plutôt que sous la conduite d’un pauvre jongleur ; et bien que, maîtresse de ce superbe château, le moindre mot de sa bouche dût, en toute justice, en faire ouvrir les portes, elle ne pouvait se dissimuler les difficultés et les périls qu’elle devait rencontrer pour se faire admettre dans sa propre demeure.

Les dangers et les obstacles semblaient en effet augmenter à chaque instant, et elle se vit sur le point d’être définitivement arrêtée dans sa marche à son arrivée devant une grande porte ouvrant sur une large et belle avenue qui traversait le parc dans une étendue d’environ deux milles, et d’où l’œil jouissait des plus beaux points de vue du château et du lac. Cette avenue aboutissait au pont nouvellement construit, dont elle était une dépendance, et c’était celle que devait suivre la reine pour se rendre au château dans cette mémorable circonstance.

La comtesse et Wayland trouvèrent la porte de cette avenue, qui donnait sur la route de Warwick, gardée par un détachement de yeomen à cheval de la garde de la reine, armés de cuirasses richement guillochées et dorées, coiffés de casques au lieu de bonnets, et portant la crosse de leurs carabines appuyée sur la cuisse. Ces cavaliers, qui faisaient le service partout où la reine se rendait en personne, étaient placés là sous les ordres d’un poursuivant d’armes, ayant au bras une plaque aux armes du comte de Leicester, pour indiquer qu’il lui appartenait, et ils refusaient impitoyablement l’entrée à tout le monde, excepté aux personnes invitées à la fête, ou aux individus appelés à jouer quelque rôle dans les divertissements qui devaient avoir lieu.

La foule était immense aux approches de cette entrée, et des gens de toute espèce faisaient valoir des motifs de toute sorte pour obtenir d’être admis ; mais les gardes étaient inexorables, et aux belles paroles, même aux offres séduisantes des solliciteurs, ils opposaient la sévérité de leur consigne, fondée sur l’aversion bien connue de la reine pour les embarras de la foule. Quant à ceux qui ne se payaient pas de ces raisons, ils étaient traités plus rudement : les soldats les repoussaient sans cérémonie par le choc de leurs chevaux bardés de fer, ou avec la crosse de leur carabine. Ces dernières manœuvres produisaient parmi la foule des ondulations qui firent craindre à Wayland de se trouver, malgré lui, séparé de sa