Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/394

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lente et profonde inclination de tête, elle continua de rester immobile et silencieuse.

D’après son costume et la petite cassette qu’elle tenait à la main, Élisabeth conjectura naturellement que la belle et muette figure qu’elle contemplait était celle d’une actrice d’un des nombreux divertissements qui avaient été préparés de différents côtés pour la surprendre par de nouveaux hommages, et que la pauvre actrice avait oublié le rôle dont elle était chargée ou manquait de courage pour le remplir. Il était naturel et digne de la courtoisie de la reine de lui donner quelques encouragements. Élisabeth lui dit donc d’un ton plein de douceur et d’affabilité : « Comment donc, belle nymphe de cette charmante grotte, es-tu sous le pouvoir d’un charme et frappée de mutisme par les enchantements de cette vilaine magicienne que les hommes appellent la Crainte ? Nous en sommes l’ennemie jurée, jeune fille, et nous pouvons détruire le charme. Parle donc, nous te le commandons. »

Au lieu de répondre par des paroles, l’infortunée comtesse tomba à genoux devant la reine, laissa échapper sa cassette de ses mains, et, les joignant avec force, leva sur elle des regards où se peignaient si énergiquement les angoisses de la crainte et les supplications les plus ardentes, qu’Élisabeth en fut très affectée. « Que signifie cela ? dit-elle ; il y a ici quelque chose d’extraordinaire. Relève-toi, damoiselle ; que veux-tu de nous ?

— Votre protection, madame, » dit en balbutiant la malheureuse suppliante.

« Il n’y a pas de fille en Angleterre qui ne l’ait, si elle en est digne, répondit la reine. Mais votre douleur semble avoir une source plus profonde que celle qui peut résulter d’un rôle oublié. Pourquoi sollicitez-vous notre protection ? »

Amy essaya de se rappeler à la hâte ce qu’il convenait le mieux de dire, afin d’écarter les dangers imminents qui l’entouraient, sans exposer son mari ; et, se plongeant d’une pensée dans une autre, au milieu du chaos qui remplissait son esprit, elle ne put trouver d’autre réponse à faire à la reine, dont elle réclamait la protection, que celle-ci, qu’elle prononça d’une voix entrecoupée : « Hélas ! je ne sais pas.

— Il y a de la folie là-dedans, jeune fille, » dit impatiemment Élisabeth ; car il y avait dans l’extrême confusion de la suppliante quelque chose qui lui inspirait autant de curiosité que d’intérêt : « Le malade doit dire sa maladie, et nous ne sommes pas habituée