Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/479

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Mais Varney fut arrêté à l’instant ; et au lieu de paraître se repentir de ce qu’il avait fait, il sembla prendre un plaisir infernal à leur montrer le corps de la comtesse assassinée, tout en les défiant de prouver qu’il eût eu aucune part à sa mort. Le désespoir de Tressilian en contemplant les restes mutilés et encore chauds d’un objet qui peu d’instants auparavant était encore si charmant et si tendrement aimé, fut tel, que Raleigh se vit obligé de le faire transporter de force hors de la maison, tandis qu’il se chargea lui-même de diriger tout ce qu’il y aurait à faire.

Varney, dans un second interrogatoire, ne chercha guère à cacher son crime et les motifs qui l’y avaient porté, donnant pour raison de sa franchise que, quoiqu’on ne pût concevoir contre lui des soupçons sur la plus grande partie des faits qu’il venait d’avouer, cependant ce soupçon même suffisait seul pour le priver de la confiance de Leicester, et détruire tous ses projets gigantesques d’ambition. « Je ne suis pas né, dit-il, pour traîner le reste de mes jours comme un proscrit, dans l’avilissement et la dégradation, et je ne veux pas non plus que ma mort soit un jour de fête pour le vulgaire. »

On craignit d’après ces paroles qu’il n’eût le dessein d’attenter à sa vie, et on eut soin de lui enlever tous les moyens d’exécuter ce projet ; mais comme quelques-uns des héros de l’antiquité, il partait sur lui une petite dose d’un poison actif, préparé probablement par le fameux Démétrius Alasco. Il avala cette potion le soir, et le lendemain on le trouva mort dans sa prison. Il ne parut pas même qu’il eût éprouvé une longue agonie ; sa physionomie présentait encore après sa mort cette expression d’amère raillerie qui lui était habituelle. Le méchant, dit l’Écriture, n’a pas de frein dans sa mort.

Le sort de son infâme complice fut long-temps inconnu. La résidence de Cumnor fut abandonnée immédiatement après le meurtre qui y avait eu lieu, car les domestiques prétendirent avoir entendu des gémissements, des cris et autres bruits surnaturels, dans le voisinage de ce qu’on appelait la chambre de lady Dudley. Après un certain laps de temps, Jeannette, n’entendant pas parler de son père, devint sans contestation maîtresse de tous ses biens, qu’elle donna avec sa main à Wayland, dont le caractère avait pris de la stabilité, et qui avait obtenu un emploi dans la maison d’Élisabeth ; mais ce ne fut que quelques années après la mort de l’un et de l’autre que leur fils aîné, faisant faire quelques fouilles dans la vieille