Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/34

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plus importants que ceux dont elle était entourée, on aurait pu lui souhaiter tout ce qui était capable d’ajouter à son bonheur ; mais on ne pouvait désirer, tant il y avait de grâce dans son sérieux naturel et sans affectation, qu’elle changeât de manières pour en prendre de plus gaies. Bref, malgré toute notre bonne volonté de ne point nous servir de la comparaison usée d’un ange, nous ne pouvons nous empêcher de dire qu’il y avait quelque chose dans la beauté sérieuse de son extérieur, dans l’aisance réservée mais gracieuse de ses mouvements, dans l’harmonie de sa voix, et dans la sereine pureté de son œil, qui semblait annoncer que Minna Troil appartenait de sa nature à une sphère plus élevée et meilleure, et qu’elle visitait passagèrement un monde peu digne d’elle.

À peine moins belle, également aimable, également innocente, Brenda différait de sa sœur autant par les traits que par le caractère, le goût et l’expression de sa physionomie. Les innombrables boucles de sa chevelure étaient de ce brun pâle qui reçoit une teinte d’or d’un furtif rayon de soleil, et redevient obscur aussitôt. Ses yeux, sa bouche, la belle rangée de dents qu’elle laissait souvent voir dans son innocente vivacité ; les couleurs fraîches, sans être trop brillantes, qui animaient une peau aussi blanche que la neige, disaient qu’elle était fille des Scandinaves. Une taille de fée, moins haute que celle de Minna, mais encore plus élégante ; la légèreté enfantine de sa démarche ; un œil qui semblait s’arrêter sur chaque objet avec la joyeuse sérénité d’une âme pure : toutes ces grâces attiraient peut-être une attention plus générale que les charmes de l’aînée des filles de Magnus, quoique l’admiration qu’on accordait à celle-ci fût d’un caractère plus solide et plus respectueux.

Les penchants de ces aimables sœurs n’étaient pas moins différents que leurs physionomies. Dans les douces affections, on ne pouvait dire que l’une surpassât l’autre, tant elles étaient attachées à leur père, et s’aimaient toutes deux ; mais la gaîté de Brenda se mêlait à toute sa vie, et semblait inépuisable, malgré sa profusion. L’enjouement moins vif de sa sœur paraissait n’apporter dans la société qu’un désir réservé de s’intéresser et de se plaire à ce qui se passait ; mais elle se laissait plutôt tranquillement entraîner par le torrent de la joie commune, qu’elle n’était disposée à en accélérer le cours par ses propres efforts ; elle supportait la gaîté plus qu’elle n’en jouissait, et les plaisirs qui avaient le plus d’attraits pour elle étaient d’un genre grave et solitaire. Les connaissances que l’on