Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/413

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mieux que personne comment vous vous l’êtes gagnée ; mais je l’ai vue intercédant pour vous aux genoux du roi. Elle fut confiée à ma charge pour l’amener ici en tout honneur et toute sûreté. Si j’en avais été le maître, je l’aurais plutôt menée à Bridewell, pour qu’on lui tempérât le sang au moyen d’une bonne correction. Voyez un peu la délurée commère, qui veut porter les culottes avant d’être mariée. — Sir Mungo, dit Nigel, je vous prie de parler de cette jeune demoiselle avec un peu plus de respect. — J’en parlerai certainement avec tout le respect qui convient à la maîtresse de Votre Seigneurie et à la fille de David Ramsay, milord, » répondit sir Mungo avec le ton le plus caustique.

Nigel était assez tenté de prendre la chose au sérieux ; mais une affaire de ce genre avec sir Mungo eût été ridicule : il étouffa donc son ressentiment, et le conjura de lui dire ce qu’il avait vu et entendu au sujet de cette jeune personne.

« Je n’en sais pas grand’chose, sinon que j’étais dans l’antichambre quand elle reçut audience, et j’entendis le roi lui dire, à ma grande perplexité, « Pulchra sane puella. » Sur quoi Maxwell, qui n’entend que médiocrement le latin, crut que Sa Majesté l’appelait de son nom de Sawney, et ouvrit la porte de la salle d’audience ; c’est alors que je vis le roi relever de ses propres mains la jeune fille, qui, comme je l’ai déjà dit, était déguisée en garçon. Cela aurait pu me donner à penser ; mais notre gracieux maître est vieux, et n’a jamais été un grand séducteur, même dans sa jeunesse ; il la consolait à sa manière, en lui disant : « Il ne faut pas vous désoler, ma belle enfant, Glenvarlochides obtiendra justice ; le premier moment de surprise passé, nous n’avons pas cru qu’il eût médité aucun complot contre notre personne. Quant à ses autres délits, nous examinerons nous-même scrupuleusement cette affaire, et ne déciderons rien à la légère. » Là-dessus on me confia la jeune fugitive pour la remettre ici sous la protection de lady Mansel ; et Sa Majesté me recommanda de ne pas lui dire un mot qui eût rapport à vos fautes, car la pauvre enfant, ajouta-t-il, a pris tant de chagrin à son sujet qu’elle en a le cœur brisé. — Et c’est là-dessus que charitablement vous avez fondé, au préjudice de cette jeune demoiselle, l’opinion que vous avez jugé à propos de m’exprimer tout à l’heure ? — En bonne conscience, milord, que voulez-vous que je pense d’une fille qui s’est déguisée en garçon, et qui va se jeter aux pieds du roi pour le solliciter en faveur d’un jeune seigneur libertin ? Je ne sais pas