« Nous avons dit à Votre Seigneurie, dans une épître secrète que nous avons écrite ce matin de notre propre main pour lui prouver que nous n’avons pas perdu le souvenir de ses fidèles services, que nous avions à vous communiquer des choses qui demandent, pour être supportées, beaucoup de patience et de courage ; c’est pourquoi nous vous avons exhorté à lire quelques-uns des plus éloquents passages de Sénèque et de Boetius, de Consolatione, afin d’y puiser des forces proportionnées au fardeau que vous allez avoir à soutenir… C’est un conseil que nous vous avons donné d’après notre propre expérience…
Non ignora mali, miseris succurrere disco[1],
disait Didon, et je pourrais dire aussi personnellement, non ignarus.
Mais en changeant le genre, la prosodie s’en ressentirait ; et
c’est un point sur lequel nos sujets anglais sont chatouilleux.
Ainsi donc, lord Huntinglen, je me flatte que vous avez suivi notre
conseil, et que vous êtes exercé à la patience avant d’en avoir
besoin : Venienti occurite morbo, préparez le remède dès le commencement
de la maladie. — Sous le bon plaisir de Votre Majesté,
répondit lord Huntinglen, je suis un vieux soldat plutôt qu’un
savant… et si mon caractère naturellement un peu dur ne suffit
pas pour me faire supporter les calamités qui m’attendent, j’espère
que Dieu me fera grâce d’en chercher et d’en trouver la force
dans quelque texte des saintes Écritures. — Oui, vraiment[2] ! dit
le roi… La Bible, mon ami, » ajouta-t-il en touchant son bonnet,
« est en effet principium et fons[3]; mais il est bien dommage que Votre Seigneurie ne puisse la lire dans l’original… car, quoique
nous en ayons nous-même encouragé la traduction… puisqu’il
est dit, comme vous pourrez le lire au commencement de toutes
les bibles, que lorsque quelques nuages sombres eurent paru
menacer d’envelopper le pays après la disparition de cet astre
brillant, la reine Élisabeth, notre apparition, comme celle du soleil,
eut bientôt dissipé ces vapeurs naissantes… Comme je le disais
donc, quoique nous ayons protégé la prédication de l’Évangile,
et surtout la traduction des saintes Écritures, des langues
originales et sacrées, cependant nous avouons nous-même avoir
trouvé une consolation à les consulter dans le texte hébreu que