Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/460

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dépens de la simplicité et du pédantisme de notre Écossais, outre la chance qu’il y avait de le débarrasser de quelques pièces d’or, car il paraissait en avoir beaucoup à sa disposition.

La bouteille circula librement ; mais la liqueur pétillante des Canaries, sur la surface de laquelle étincelaient ces brillants globules qu’on peut comparer aux atomes lumineux qu’on distingue dans l’air aux rayons du soleil, n’eut pas même la puissance d’affaiblir la gravité magistrale de Richie ; il continua d’être sérieux comme un juge tout en buvant comme un poisson, parce qu’il aimait naturellement à boire, et peut-être aussi parce qu’il voulait exciter ses hôtes à l’imiter.

Quand le vin commença à faire fermenter leurs têtes, maître Lowestoffe, qui probablement avait assez des bizarreries de Richie, lequel avait fini par prendre un ton encore plus dogmatique et plus tranchant qu’au commencement du dîner, proposa à son ami de terminer cette orgie et de se joindre aux joueurs.

On appela donc le garçon ; Richie paya les frais du dîner, et donna aux domestiques un généreux pour-boire, qui fut reçu chapeau bas, avec des assurances répétées d’empressement et de zèle.

« Je suis fâché que nous soyons obligés de nous quitter sitôt, messieurs, dit Richie à ses compagnons, et j’aurais désiré que nous pussions vider encore quelques bouteilles avant de nous séparer, ou que vous eussiez mangé un morceau à souper, et bu un verre de vin du Rhin. Je vous remercie cependant de m’avoir fait l’honneur d’assister à ma pauvre collation, et je vous recommande à la fortune dans la route que vous allez suivre, car l’Ordinaire n’est et ne sera jamais mon élément. — Adieu donc, très-docte et très sentencieux maître Moniplies, répliqua Lowestoffe ; puissiez-vous bientôt avoir un autre bien à dégager ; puissé-je vous servir encore de témoin, et puissiez-vous encore une fois vous montrer surtout aussi bon compagnon que vous l’avez été aujourd’hui ! — Ah ! messieurs, cela vous plaît à dire ; mais si vous vouliez seulement me permettre de vous donner quelques conseils au sujet de ce misérable Ordinaire. — Gardez la leçon pour une autre fois, très-honorable Richie, dit Lowestoffe, jusqu’à ce que j’aie perdu tout mon argent », montrant en même temps une bourse assez bien garnie, « et alors il est à croire qu’elle sera bien reçue. — Et gardez-en ma part, Richie, » dit l’autre étudiant, montrant à son tour une bourse presque vide, « jusqu’à ce qu’elle