Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/428

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été la nuit dernière envoyé à la Tour : le capitaine croira vous avoir assez tenu parole, en vous logeant avec le sir Geoffrey que voici, et qui est assurément le plus remarquable des deux. — Allez, je vous prie, dit Peveril, expliquer cette méprise à votre maître, et dites-lui que je demande à être envoyé à la Tour. — À la Tour ! Ah ! ah ! ah ! repartit le drôle. La Tour est pour les lords et les chevaliers, et non pour des écuyers de bas étage ; pour les crimes de haute trahison, et non pour des égratignures faites dans la rue avec une rapière et un poignard ; et il faut un ordre du secrétaire d’état pour y envoyer les gens. — Du moins, que je ne sois point à charge à monsieur, dit Peveril. Il est tout à fait inutile de nous loger ensemble, puisque nous ne nous connaissons même pas : allez prévenir votre maître de cette méprise. — En vérité, j’irais bien, » répondit Clink en grimaçant encore, « si je n’étais pas certain qu’il le sût déjà. Vous avez payé pour être mis avec sir Geoffrey, et il vous a mis avec sir Geoffrey. Vous êtes couché en conséquence sur le registre, et il ne raie jamais personne. Allons, allons, consolez-vous, je vous donnerai des fers légers et peu gênants… C’est tout ce que je puis faire pour vous. »

La résistance et les supplications auraient été également inutiles. Peveril se laissa donc attacher au-dessus de chaque cheville une paire de fers qui lui laissaient la liberté d’aller et de venir dans la chambre.

Durant cette opération, il réfléchit que le geôlier, qui avait pris avantage de l’équivoque entre les deux sirs Geoffrey, devait avoir agi comme on le lui donnait à entendre, et par conséquent l’avoir trompé avec préméditation, puisque le mandat d’emprisonnement portait qu’il était fils de sir Geoffrey Peveril. Il était donc à la fois inutile et humiliant de faire des représentations à un tel homme sur ce sujet. Julien se soumit à son destin, lorsqu’il vit qu’aucun effort ne pouvait l’y soustraire.

Le porte-clefs lui-même fut presque touché de sa jeunesse, de sa bonne mine et de la patience avec laquelle, après la première effervescence du désappointement, le nouveau prisonnier se résignait à son sort. « Vous me semblez un brave jeune homme, dit-il ; vous aurez au moins un bon dîner, et pour coucher une aussi bonne paillasse qu’on peut en trouver entre les murs de Newgate… Et vous, maître sir Geoffrey, qui n’aimez pas les hommes de haute taille, vous devez faire cas de maître Peveril ; car je vous dirai qu’il est ici pour avoir fait une entaille à Jack-Jenkim,