Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/449

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moi, où la protection doive mériter de ma part plus de reconnaissance. Le destin de tout ce qui m’est cher est dans la balance, et je donnerais tous les trésors du monde pour apprendre que je n’ai aucun malheur à déplorer. — Je vous l’ai déjà dit, mon pouvoir est limité, répondit la voix ; vous, je puis peut-être vous sauver ; mais le destin de vos amis est hors de ma puissance. — Faites-le-moi du moins connaître, reprit Julien ; et quel qu’il soit, je ne balancerai pas à le partager. — Et sur qui donc voulez-vous me questionner ? » répliqua l’harmonieuse et douce voix, non sans un léger tremblement, comme si elle eût adressé cette question avec une sorte de répugnance. — Sur mes parents, » répondit Julien après un moment d’hésitation ; « comment se trouvent-ils ? quel sera leur destin ? — Ils sont comme le fort sous lequel l’ennemi a creusé une mine fatale. L’ouvrage peut avoir coûté des années de travail, tant les mineurs rencontraient d’obstacles ; mais le temps apporte l’occasion sur ses ailes ? — Et quel sera l’événement ? — Puis-je lire dans l’avenir, autrement qu’en le comparant au passé ? Où sont-ils, ceux qui ont été poursuivis par ces accusations cruelles et infatigables, sans avoir fini par succomber ? Une haute et noble naissance, une honorable vieillesse, une bienveillance reconnue, ont-elles sauvé le malheureux Stafford ? La science de Colemann, son talent pour l’intrigue et sa haute faveur à la cour l’ont-ils pu préserver, lui serviteur et confident de l’héritier présomptif de la couronne d’Angleterre ? Qu’ont valu à Fenwicke, à Whitbread et à tant d’autres prêtres accusés, le génie, l’adresse et les efforts d’une secte nombreuse ? Groves, Pickering et tant d’autres infortunés sans nom furent-ils mieux défendus par leur obscurité ? Nulle condition, nulle sorte de talent, nuls principes ne peuvent protéger contre une accusation qui nivelle tous les rangs, confond tous les caractères, change les vertus en crimes, et considère les hommes comme dangereux en raison de l’influence qu’ils exerçaient, bien qu’ils l’aient acquise de la plus noble manière, et qu’ils n’en usent qu’avec les meilleures intentions. Accusez qui que ce soit de complicité dans la conspiration, appelez en témoignage contre lui Oates ou Dugdale, et le plus aveugle prévoira l’issue de son jugement. — Prophète de malheur ! mon père sera protégé par un impénétrable bouclier : il est innocent. — Qu’il se prévale de son innocence à la barre du ciel, car elle lui servira peu devant le tribunal que Scroggs préside. — Je ne crains cependant rien, »