Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/586

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Charles fit signe de l’œil à Ormond, et ayant, avec sa courtoisie ordinaire, exprimé sa conviction profonde que Julien imiterait la loyauté de ses ancêtres, et particulièrement celle de son père, il ajouta qu’il pensait que Sa Grâce le duc d’Ormond avait à communiquer au chevalier quelque chose qui importait à son service. Sir Geoffrey fit alors un salut militaire et suivit le duc, qui se mit à l’interroger sur les événements de la journée. En même temps Charles, après s’être assuré que le fils n’avait pas la tête aussi joyeusement monté que le père, lui demanda et en obtint un récit exact de tout ce qui s’était passé après le jugement.

Julien, avec toute la clarté et la précision que demandait un pareil sujet traité devant la personne à qui il parlait, raconta tout ce qui avait eu lieu jusqu’à l’arrivée de Bridgenorth, et le roi fut si satisfait de la manière dont il faisait sa narration, qu’il se félicita avec Arlington d’avoir au moins le témoignage d’un homme de sens sur ces événements obscurs et mystérieux. Mais dès que Bridgenorth eut été mis en scène, Julien hésita à le nommer ; et quoiqu’il fît mention de la chapelle qu’il avait vue remplie d’hommes armés, et du langage violent du prédicateur, il se hâta d’ajouter que néanmoins ils s’étaient retirés sans en venir à aucune extrémité, et avaient tous quitté la maison avant que son père et lui fussent mis en liberté.

« Et vous vous retirâtes tranquillement pour aller dîner dans Fleet-Street, jeune homme, » dit le roi d’un ton sévère, « sans donner avis à un magistrat de l’assemblée dangereuse qui s’était tenue dans le voisinage de notre palais, et dont les membres n’avaient pas caché leur intention de se porter à des actes criminels. »

Peveril rougit, et se tut. Le roi fronça le sourcil, et se retira à l’écart pour causer avec Ormond, qui rapporta que le père paraissait n’avoir rien su de l’affaire.

« Et le fils, je suis fâché de le dire, reprit le roi, semble plus éloigné de vouloir dire la vérité que je ne m’y attendais. Nous avons toute sorte de témoins pour cette singulière investigation : un témoin fou dans le nain, un témoin ivre dans le père, et maintenant un témoin muet. Jeune homme, » continua-t-il en s’adressant à Julien, « votre conduite est moins franche que je ne m’y attendais de la part du fils de votre père. Il faut que je sache quelle est cette personne avec qui vous vous êtes entretenu si intimement : vous la connaissez, je présume ? »

Julien avoua que oui ; mais mettant un genou en terre, il demanda pardon à Sa Majesté de ce qu’il cachait son nom : « il avait été mis en liberté, dit-il, à cette condition. — Ce fut une promesse forcée, d’après vos propres aveux, répondit le roi, et je ne puis vous autoriser à la tenir ; il est de votre devoir de dire la vérité. Si vous craignez Buckingham, le duc se retirera. — Je