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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/201

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descendra, comme la première et la seconde pluie, sans interruption, sans diminution, sans limites assignables, fertilisant certaines terres, en inondant quelques autres, changeant toutes les formes de la vie sociale ; établissant et renversant des religions ; fondant et détruisant des royaumes… — C’est assez, Galeotti ! s’écria le roi. Tous ces changements arriveront-ils de notre temps ? — Non, mon frère, répondit Martivalle ; cette invention peut se comparer à un jeune arbre qui vient d’être planté, mais qui, dans les générations suivantes, portera un fruit aussi fatal, mais aussi précieux que celui du jardin d’Éden, c’est-à-dire, la connaissance du bien et du mal. — Que l’avenir songe à ses propres affaires, » dit Louis après un moment de silence. « Nous vivons dans le temps présent, et c’est au temps présent que nous bornerons tous nos soins. À chaque jour suffit sa peine. Dites-moi, avez-vous terminé l’horoscope que je vous ai envoyé, et dont vous m’avez déjà entretenu ? J’ai amené ici la personne, afin que vous puissiez examiner sa main, c’est-à-dire, exercer à son égard la chiromancie, si vous le trouvez convenable. L’affaire est pressante. »

Le sage quitta son siège ; s’approchant ensuite du jeune soldat, il fixa sur lui ses grands yeux noirs, où brillait la pénétration, comme s’il eût été intérieurement occupé à détailler, à disséquer chaque trait, chaque linéament de son visage. Rougissant et intimidé par un examen si attentif de la part d’un homme dont l’extérieur était si vénérable et si imposant, Quentin baissa les yeux, et ne les releva que pour obéir à la voix sonore de l’astrologue, qui lui dit : « Ne t’intimide pas ; lève les yeux, et montre-moi ta main. »

Lorsque Martivalle eut inspecté la paume de la main de Durward, suivant la forme des arts mystiques qu’il pratiquait, il tira le roi à l’écart, et après avoir fait ensemble quelques pas, il lui dit : « Mon royal frère, la physionomie de ce jeune homme et les lignes de sa main confirment d’une manière surprenante le rapport que j’avais fondé sur son horoscope, aussi bien que le jugement que vos propres connaissances dans les arts sublimes vous ont mis à même de porter de lui. Tout annonce qu’il sera brave et heureux. — Et fidèle ? dit le roi ; car la valeur et la fortune ne vont pas toujours de pair avec la fidélité. — Et fidèle, répondit l’astrologue ; car il a dans l’œil et dans le regard une mâle fermeté, et sa linea vitæ, sa ligne de vie, est profondément et nettement marquée, ce qui dénote un attachement ferme et loyal envers ceux