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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/327

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faire, ma belle cousine ? » ajouta-t-il d’un ton railleur ; « il est temps que nous nous mettions en chemin. — Il ne me reste plus, » dit la comtesse en faisant un effort pour parler, « qu’à vous prier d’être favorable à… à… ce jeune gentilhomme. — Vraiment ! » répondit Crèvecœur en jetant sur Quentin le même coup d’œil pénétrant qu’il avait fixé sur Glover, mais, à ce qu’il parut, avec un résultat beaucoup moins satisfaisant. « Diable ! » ajouta-t-il en imitant d’une manière plutôt plaisante qu’offensante l’embarras de la comtesse, « voici une lame d’une autre trempe ! Je vous en prie, belle cousine, qu’a fait ce… ce jeune gentilhomme pour s’être rendu digne à ce point de votre intercession ? — Il m’a sauvé l’honneur et la vie, » répliqua la comtesse, sur le front de qui la modestie et le ressentiment firent monter une subite rougeur. Quentin rougit aussi d’indignation ; mais la prudence lui fit sentir qu’en s’y abandonnant il ne ferait qu’empirer les choses. — « Diable ! » répéta le comte de Crèvecœur ; « l’honneur et la vie ! Il me semble, belle cousine, qu’il aurait été plus convenable que vous ne vous fussiez pas mise dans le cas d’avoir de semblables obligations à ce jeune homme. Mais n’importe, il peut nous suivre, si sa qualité le lui permet, et je veillerai à ce qu’il n’ait à souffrir aucune injure. Quant à votre honneur et à votre vie, c’est moi qui me chargerai désormais du soin de les défendre ; et peut-être trouverai-je pour ce jeune homme quelque emploi plus convenable que celui d’écuyer-servant de damoiselles errantes. — Comte, » dit Durward, incapable de garder le silence plus long-temps, « de peur que vous ne parliez d’un étranger sur un ton plus léger que vous ne jugeriez convenable ensuite de l’avoir fait, je prends la liberté de vous apprendre que je suis Quentin Durward, archer de la garde écossaise du roi de France, corps dans lequel, ainsi que vous le savez fort bien, on ne reçoit que des gentilshommes et des hommes d’honneur. — Je vous remercie de l’information et je vous baise les mains, seigneur archer, » répondit Crèvecœur sur le même ton de raillerie. « Ayez la bonté de marcher près de moi, en tête du détachement. »

Au moment où Quentin s’apprêtait à obéir aux ordres du comte, qui avait alors sinon le droit, du moins le pouvoir de lui commander, il remarqua que la comtesse Isabelle suivait tous ses mouvements avec un air d’intérêt inquiet et timide, qui ressemblait presque à l’expression de la tendresse ; et cette vue l’émut si vivement que ses yeux se remplirent de larmes. Mais il se rappela