Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/153

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comme pour accuser le ciel et la terre de ses malheurs, et poussa, à plusieurs reprises, des cris perçants semblables à ceux de l’aigle qui a trouvé son aire veuve de ses petits. Pendant quelque temps elle exhala ses douleurs en gémissements inarticulés, puis elle poursuivit sa route d’un pas rapide et inégal, nourrissant dans son âme le vain espoir d’atteindre le détachement qui conduisait son fils prisonnier à Dunbarton. Mais ses forces, bien que surnaturelles pendant un moment, lui manquèrent tout à coup dans cette cruelle épreuve, et, malgré tous ses efforts, il lui devint impossible d’accomplir son dessein.

Elle se pressa cependant d’avancer avec toute la promptitude dont son corps épuisé fut capable. Lorsque le besoin de nourriture devenait impérieux, elle entrait dans la première chaumière : « Donnez-moi du pain, disait-elle, je suis la veuve de Mac Tavish Mhor ; donnez-moi à manger, je suis la mère d’Hamish Mac Tavish ; donnez, qu’une fois encore je puisse voir mon fils à la blonde chevelure ! » Et jamais sa demande n’était rejetée, bien qu’en plusieurs cas on la satisfît après une espèce de lutte entre la compassion et la crainte, sentiment qu’elle inspirait tour à tour à ceux auxquels elle s’adressait. On ne savait pas exactement la part qu’elle avait eue à la mort d’Allan Break Cameron, qui devait probablement entraîner celle de son fils ; mais, d’après la connaissance que l’on avait de ses passions violentes et des habitudes de sa vie passée, nul ne doutait que, d’une manière ou d’une autre, elle ne fut la cause de la catastrophe, et l’on considérait Hamish Beam, dans ce meurtre, bien plutôt comme l’instrument de sa mère que comme son complice.

Cette opinion générale parmi ses compatriotes ne fut nullement utile à l’infortuné jeune homme. Son capitaine Green Colin, connaissant parfaitement les mœurs et les coutumes de son pays, obtint facilement d’Hamish toutes les particularités relatives à sa désertion supposée et à la mort du sous-officier. Il éprouvait la plus vive compassion pour ce jeune homme, victime de la tendresse extravagante et fatale de sa mère. Mais il n’avait aucune excuse à alléguer pour sauver le malheureux Hamish de la condamnation que la discipline militaire et le jugement d’une cour martiale prononcèrent contre lui.

Il fallait peu de temps pour instruire ce procès, et il s’en écoula fort peu aussi entre la sentence et l’exécution. Le général avait résolu de faire un exemple sévère du premier déserteur qui tom-