Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/161

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ges ses épaules, et de se déchirer les pieds en allant en pèlerinage, et il lui aurait accordé son pardon quand il aurait vu son sang couler et sa chair meurtrie. Tels étaient les prêtres qui avaient un pouvoir réel même sur les plus puissants. Ils menaçaient les grands de la terre avec des paroles qui sortaient de leur bouche, avec les sentences de leurs livres sacrés, avec la lueur de leurs cierges et le tintement lugubre de leurs cloches. Les puissants s’inclinaient à leur voix ; à l’ordre des prêtres, ils déliaient ceux qu’ils avaient enchaînés dans leur colère ; ils mettaient en liberté, sans lui nuire, celui qu’ils avaient condamné à la mort et dont ils voulaient le sang. Ceux-là étaient des prêtres puissants, et ils avaient bien le droit d’ordonner au pauvre de s’agenouiller, puisqu’ils pouvaient humilier les superbes. Mais vous ! contre qui exercez-vous votre force ? contre de faibles femmes, coupables de folie, et quelques hommes qui jamais n’ont su porter l’épée ! Les prêtres d’autrefois ressemblaient au torrent qui, pendant l’hiver, remplit les profondeurs de la vallée et fait rouler les uns contre les autres les quartiers de rochers aussi aisément que le jeune garçon joue avec la balle qu’il jette devant lui. Mais vous, vous ne ressemblez qu’au ruisseau qui, desséché par les chaleurs de l’été, est détourné par les joncs et arrêté par un buisson de glaïeuls. Malheur sur votre tête, puisqu’il n’y a point de secours à attendre de vous ! »

Le ministre n’eut pas de peine à comprendre qu’Elspat avait renoncé à la foi catholique romaine sans en adopter aucune autre. Elle conservait encore une idée vague et confuse des accommodements que l’on pouvait faire avec les prêtres, par le moyen de la confession, des aumônes et de la pénitence : elle se rappelait l’étendue de leur pouvoir, qui, selon elle, aurait été capable d’assurer le salut de son fils. Ému de compassion pour son malheur, et plein d’indulgence pour ses erreurs et son ignorance, il lui répondit avec douceur :

« Hélas ! malheureuse femme ! plût à Dieu que je pusse t’apprendre aussi aisément où tu dois désormais chercher des consolations, qu’il m’est facile de t’assurer d’un seul mot que Rome et tout son clergé, fussent-ils encore dans toute la plénitude de leur pouvoir, ne sauraient, ni en récompense de tes dons, ni pour tes pénitences, apporter à tes infortunes la plus faible consolation. Elspat Mac Tavish, j’ai de cruelles choses à vous apprendre.

— Je les sais déjà sans que tu aies besoin de recourir à des paroles, répondit l’infortunée ; mon fils est condamné à mourir.