Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/260

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je puis vous être utile, par mes conseils ou autrement, je suis à vos ordres. C’est la seule manière dont je puisse servir Menie Grey.

— Qui aime ma maîtresse m’aime : heureuse variante du vieux proverbe « qui m’aime aime mon chien. » Eh bien donc, pour l’amour de Menie Grey, si ce n’est pas pour celui de Dick Middlemas (peste soit de ce nom vulgaire qui rappelle tant de choses !) voulez-vous, vous qui êtes spectateur, nous dire à nous malheureux joueurs, ce que vous pensez de la partie que nous faisons en ce moment ?

— Comment pouvez-vous adresser une pareille question, lorsque vous avez si beau jeu ? Le docteur Grey ne peut refuser de vous garder comme son aide aux mêmes conditions qu’il me proposait. Vous êtes, sous le rapport pécuniaire, un meilleur parti pour sa fille, puisque vous avez un capital, pour commencer votre fortune.

— C’est la pure vérité… mais il me semble que M. Grey n’a pas montré une grande prédilection pour moi dans cette affaire.

— S’il n’a pas rendu justice à votre incontestable mérite, » dit Hartley un peu sèchement, « la préférence que vous accorde sa fille doit plus que vous en dédommager.

— Sans contredit, et c’est pourquoi je l’aime de tout mon cœur ; autrement, Adam, je ne suis pas homme à me jeter sur les restes des autres.

— Richard, cet orgueil que vous montrez là, si vous n’en rabattez rien, vous rendra non moins ingrat que malheureux. M. Grey vous est très-favorable. Il m’a dit en termes clairs qu’en se choisissant un aide qui par la suite deviendrait membre de sa famille, l’ancienne affection qu’il vous porte l’avait fait balancer long-temps ; et que s’il était décidé en ma faveur, c’est qu’il croyait avoir remarqué en vous une aversion évidente pour le genre de vie modeste que son offre renfermait, et un violent désir de vous lancer dans le monde, et d’y pousser, comme on dit, votre fortune. Il a ajouté que, si pour le moment vous aimiez sa fille au point d’abandonner ces idées ambitieuses pour l’amour d’elle, néanmoins les démons de l’ambition et de la cupidité reviendraient après que l’amour, ce puissant exorciste, aurait épuisé la force de ses charmes, et qu’alors il pensait avoir de justes raisons d’être inquiet pour le bonheur de sa fille.

— Sur ma foi ! le digne vieillard parle doctement et sagement,