Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/92

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d’hui n’en savent. Je vous dirai, par exemple, que comme Jacques galopait vers l’Angleterre, emportant sac et bagage, il fut arrêté près de Cockensie par le convoi funèbre du comte de Winton, le vieux et fidèle serviteur de sa malheureuse mère, la pauvre Marie ! Ce fut un sinistre présage, et on en vit la preuve, cousin. »

Je ne cherchai point à poursuivre ce sujet, sachant bien que mistress Baliol n’aimait pas à être questionnée sur l’article des Stuarts, dont elle déplorait d’autant plus amèrement les malheurs que son père avait épousé leur cause. Cependant son attachement à la dynastie actuelle étant sincère et même ardent, par la raison puissante que sa famille avait servi le feu roi dans la paix comme à la guerre, elle était assez embarrassée pour concilier ses opinions, relativement à la famille exilée, avec les sentiments qu’elle professait pour la famille actuelle. En définitive, comme un grand nombre d’anciens jacobites, elle se résignait à être tant soit peu inconséquente avec elle-même, par la pensée consolante que maintenant les choses étaient ce qu’elles devaient être, et qu’il n’y avait aucune utilité à jeter un regard trop scrupuleux sur les temps passés, et à examiner de trop près ce qui était juste ou injuste un demi-siècle auparavant.

« Les montagnes d’Écosse, lui dis-je, doivent être pour vous une mine féconde de souvenirs : vous avez été témoin des changements survenus dans cette contrée primitive, et vous avez vu une race peu éloignée de la première période sociale se mêler et se fondre dans la grande masse de la civilisation. Ceci n’a pu arriver sans des événements remarquables, chapitres intéressants dans l’histoire de l’humanité.

— Cela est bien vrai, répondit mistress Baliol : on croirait que de tels événements ont dû faire de fortes impressions sur ceux qui en ont été témoins, et cependant à peine ont-ils paru les remarquer. Quant à moi, je ne suis pas née dans les montagnes, et les anciens chefs des Highlands (j’en ai connu plusieurs) avaient dans les manières bien peu de chose qui les distinguât de la noblesse des basses terres, quand ils venaient à Édimbourg, et quand ils quittaient leur costume national pour se mêler à la société de la métropole. Leur caractère naturel ne se déployait que chez eux, parmi les clans. Car n’allez pas vous imaginer qu’ils s’amusaient à faire les fanfarons sur la place de la Croix[1], avec leurs plaids et

  1. Dans High Street. a. m.