Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/279

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premier magistrat de Dumfries : c’était ce même prévôt Crosbie qui avait donné la première nouvelle de la disparition de Darsie. Dès qu’Alan eut annoncé le motif de sa visite, il crut distinguer dans l’âme de l’honnête dignitaire un désir de ne pas continuer la conversation sur ce sujet. Le prévôt parla de l’émeute qui avait eu lieu à la pêcherie comme « d’une querelle entre ces misérables vauriens de pêcheurs. C’est une affaire qui regarde le shérif, dit-il, plus que nous autres pauvres membres du conseil municipal, qui avons déjà assez de mal à maintenir la tranquillité dans la ville, avec les bandes de malfaiteurs dont elle est infectée.

— Mais ce n’est pas tout, prévôt Crosbie, répliqua M. Alan Fairford ; un jeune homme distingué par son rang et sa fortune a disparu entre les mains de ces misérables. — Vous le connaissez ; mon père lui avait donné une lettre pour vous ; — il s’agit de M. Darsie Latimer.

— Oui vraiment ! oui vraiment ; M. Darsie Latimer ! il a dîné chez moi : — j’espère qu’il se porte bien.

— Je l’espère aussi, » répliqua Alan d’un ton presque indigné ; « mais je désire acquérir plus de certitude sur ce point : vous écrivîtes vous-même à mon père qu’il avait disparu.

— Oui, ma foi ! c’est la vérité. Mais n’a-t-il donc pas été rejoindre ses amis en Écosse ? Il n’était pas naturel de penser qu’il resterait ici.

— Il n’y serait pas resté, à moins d’y être contraint, » repartit Fairford surpris de la froideur avec laquelle le prévôt semblait prendre cette affaire.

« Comptez bien alors, monsieur, que, s’il n’est pas retourné vers ses amis d’Écosse, il doit être allé rendre visite à ses amis d’Angleterre.

— Je n’admettrai pas une pareille explication : s’il y a des lois et de la justice en Écosse, j’éclaircirai cette affaire jusqu’au fond.

— Vous aurez raison, parfaitement raison, de pousser les choses aussi loin que possible ; mais vous savez que mon autorité ne s’étend pas au-delà des portes de la ville.

— Mais vous êtes membre du conseil général, M. Crosbie. Vous êtes encore juge de paix du comté.

— Vrai, très-vrai ; — du moins, répliqua le prudent magistrat, je ne nierai pas que mon nom ne puisse se trouver sur la liste des juges, mais je ne puis me rappeler qu’on m’ait jamais autorisé à exercer en me faisant prêter serment.