Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/437

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pour courir à travers tout le Cumberland après un méchant vagabond sans cervelle qu’on nomme Darsie Latimer ?

— Darsie Latimer ! » dit vivement M. Geddes ; « savez-vous la moindre chose sur Darsie Latimer ?

— Peut-être oui, peut-être non, répondit Pierre : je ne suis pas tenu de répondre aux questions du premier venu, quand elles ne sont pas posées judiciairement et dans les formes de la loi, — surtout avec des gens qui font tant d’embarras pour un coup d’ale ou pour une goutte d’eau-de-vie. Mais quant à ce gentilhomme qui s’est montré gentilhomme en déjeunant, et se montrera encore gentilhomme à son repas de midi, je suis tout disposé à l’éclaircir sur tous les points de la cause qui peuvent paraître se rapporter à la question en litige.

— Ma foi ! tout ce que j’ai besoin de savoir, mon ami, c’est si vous cherchez cet Alan Fairford pour lui faire du bien ou du mal ; parce que si vous venez lui faire du bien, je crois que vous pourrez parvenir à lui parler ; — mais si vous voulez lui faire du mal, je prendrai la liberté de vous conduire sur l’autre rive de la Solway, avec l’avis amical de ne plus vous charger d’une semblable commission, de crainte que pire ne vous arrive. »

Les manières et le langage d’Ewart étaient tels, que Josué Geddes résolut de garder un profond silence jusqu’à ce qu’il pût découvrir clairement si le marin voulait l’aider dans ses recherches relativement à Darsie Latimer, ou bien y mettre obstacle. Il se décida donc à écouter attentivement l’entretien qui allait avoir lieu entre le capitaine et Pierre, et à épier l’occasion de questionner celui-ci, aussitôt qu’il se séparerait de sa nouvelle connaissance.

— Je n’ai aucune envie, répliqua Pierre Peebles, de faire le moindre mal physique à ce pauvre garçon de Fairford qui a reçu de bonnes guinées de moi, aussi bien que son père avant lui ; mais je voudrais le ramener pour qu’il raccommodât mes affaires aussi bien que les siennes. Et peut-être ne lui intenterai-je d’action en dommages et intérêts que pour lui faire rendre ses honoraires, et payer à son client une rente annuelle sur la somme principale, due à partir du jour où il aurait pu me la faire restituer, capital et intérêts, savoir à partir du jour de la grande plaidoirie ; car, vous concevez, c’est le moins que je puisse réclamer nomine damni[1]. Du reste, je n’ai pas l’intention de lui

  1. À titre de dommage. a. m.