Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/468

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préparatifs ne peuvent avoir été faits dans un secret si absolu, que nous puissions maintenant renoncer avec sûreté à notre entreprise : aussi est-ce avec la plus vive inquiétude que je prévois d’horribles dangers même pour votre royale personne, à moins que vous ne donniez généreusement à vos sujets la satisfaction que d’après sir Richard ils demanderont toujours avec opiniâtreté. — En effet il faut que votre inquiétude soit bien vive ! s’écria Charles-Édouard. Est-ce en me menaçant d’un danger personnel que vous croyez vaincre une résolution fondée sur un sentiment de ce qui m’est dû en ma qualité d’homme et de prince ? Si la hache et l’échafaud étaient prêts devant les fenêtres de White-Hall, je franchirais la planche franchie par mon aïeul, plutôt que de céder la moindre des choses quand l’honneur me le défend. »

Il prononça ces paroles d’un ton déterminé, et promena ses regards sur les personnes qui l’entouraient, et qui toutes paraissaient confuses et interdites : Darsie seul croyait voir dans ce débat une heureuse fin de la plus périlleuse entreprise. Enfin sir Richard reprit la parole d’une voix solennelle et mélancolique.

« Si la sûreté, dit-il, du pauvre Richard Glendale était seule intéressée dans cette affaire, je n’ai jamais attaché à ma vie assez de valeur pour n’être pas prêt à la sacrifier au moindre désir de Votre Majesté. Mais je suis un simple messager, — un simple député vers vous, je dois exécuter ma mission, et mille voix s’élèveraient pour me crier haro si je ne la remplissais pas avec fidélité. Tous vos adhérents, et Redgauntlet lui-même, voient la ruine certaine de cette entreprise, — les plus grands périls personnels pour Votre Majesté, — la destruction complète de votre parti et de vos partisans, s’ils abandonnent le point sur lequel, par malheur, Votre Majesté est si peu disposée à céder. — Je le dis avec un cœur rempli d’angoisse, — avec une émotion qui se trahit malgré moi, — mais je dois le dire, — c’est la fatale vérité : — si votre bonté royale ne peut nous faire une concession qui nous semble nécessaire à notre sûreté et à la vôtre, Votre Majesté désavouera d’un mot dix mille hommes prêts à tirer le sabre pour sa cause, ou pour parler encore plus clairement, elle anéantira jusqu’à l’ombre d’un parti royaliste dans la Grande-Bretagne.

— Et pourquoi n’ajoutez-vous pas, » dit le prince avec un air de dédain, « que les hommes qui étaient prêts à prendre les armes en ma faveur expieront leur trahison envers l’électeur en me livrant au destin que tant de proclamations m’ont annoncé ? Portez ma tête à Saint-James, messieurs ; vous commettrez ainsi une action plus profitable et plus glorieuse que de vous flétrir