Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/138

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côté de l’autre après un salut amical mais silencieux, et il y eut bientôt une distance considérable entre elles.

Le pays était plus découvert du côté du château où leur devoir les conduisait alors, que du côté qui faisait face à la porte principale. Les clairières étaient larges, les arbres disséminés sur d’immenses pâturages, et il n’y avait plus ni buissons, ni ravins, ni aucun lieu propre aux embuscades, de sorte que l’œil pouvait, grâce au clair de lune, dominer au loin le pays.

« Ici, dit Rudolphe, nous pouvons nous croire assez en sûreté pour converser librement ; c’est pourquoi je puis vous demander, Arthur d’Angleterre, maintenant que vous nous connaissez mieux, ce que vous pensez de la jeunesse suisse ? Si vous en avez appris moins que je ne l’aurais souhaité, ne vous en prenez qu’à votre caractère peu communicatif qui a pour ainsi dire refusé notre confiance. — Je l’ai seulement refusée par rapport à des choses auxquelles je n’aurais pu répondre, et par conséquent je ne devais pas la recevoir, répliqua Arthur. Le jugement que j’ai pu me former de votre pays, le voici en peu de mots : Vos projets sont aussi élevés et aussi nobles que vos montagnes ; mais l’étranger de la plaine n’est pas accoutumé à parcourir le sentier tortueux par lequel vous les gravissez. Mon pied a toujours été habitué à se mouvoir en ligne directe et sur un terrain ferme. — Vous parlez par énigmes. — Non. Je pense que vous devez avertir franchement vos anciens, qui restent toujours vos chefs, quoique vous autres jeunes gens sembliez prêts à passer devant eux, que vous craigniez une attaque dans le voisinage de La Ferette, et que vous espériez être secourus par quelques habitants de Bâle. — Oui, vraiment ! Le landamman ne manquerait pas d’interrompre son voyage pour envoyer demander un sauf-conduit au duc de Bourgogne ; et si le duc l’accordait, il nous faudrait dire adieu à toute espérance de guerre. — C’est vrai ; mais alors le landamman arriverait à son principal but, et à l’unique objet de sa mission… savoir le rétablissement de la paix. La paix… la paix ! » répliqua vivement le Bernois. « Si mes désirs seuls devaient se trouver en opposition avec ceux d’Arnold Biederman, je connais si bien son honneur et sa fidélité, je respecte si profondément sa valeur et son patriotisme, qu’à sa voix je remettrais mon épée dans le fourreau, quand même mon plus mortel ennemi serait devant moi. Mais ce désir ne m’est pas uniquement personnel ; toute la jeunesse de mon canton et celle de Soleure sont disposées à la guerre. Ce fut par la guerre, par la noble