Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/206

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exploit que Sigismond ; car, quoiqu’il fût un peu plus court de taille que ses frères, et d’un esprit moins impétueux, la largeur de ses épaules et la vigueur de ses muscles étaient néanmoins extraordinaires ; et quand il était vraiment excité, vraiment disposé à se battre, ce qui toutefois n’arrivait pas souvent, peut-être Rudolphe lui-même, sous le rapport de la force, aurait-il eu de la peine à le vaincre.

Vérité de sentiment et énergie d’expression produisent toujours leur effet sur des naturels simples et généreux. Plusieurs des jeunes gens de la troupe se mirent à s’écrier que Sigismond parlait bien ; que si le vieillard s’était exposé à un péril, c’était pour s’être plus inquiété du succès de leur négociation que de sa propre sûreté, et qu’il avait volontairement renoncé à leur protection, plutôt que de les engager dans des querelles à cause de lui. « Nous en sommes d’autant plus obligés, disaient-ils, de le soustraire au danger, et c’est ce que nous allons faire. — Paix ! vous tous, imbéciles, » dit Rudolphe regardant autour de lui avec un air de supériorité ; « et vous, Arthur d’Angleterre, adressez-vous au landamman qui nous suit de près : vous savez qu’il est notre principal commandant ; il n’est pas moins le sincère ami de votre père, et quoi qu’il puisse décider en faveur de son hôte, vous nous trouverez tous ensuite prêts à exécuter avec zèle sa moindre volonté. »

Ses compagnons parurent donner leur assentiment à cet avis, et le jeune Philipson vit qu’il lui était indispensable de se rendre à cette recommandation ; quoique à la vérité il soupçonnât encore que le Bernois par ses diverses intrigues, aussi bien avec la jeunesse suisse qu’avec celle de Bâle, et comme on pouvait le conclure des discours du prêtre de Saint-Paul, par des intelligences avec l’intérieur même de La Ferette, possédait les moyens les plus efficaces pour l’aider en pareille circonstance : néanmoins il se fiait davantage à la simple candeur et à la bonne foi parfaite d’Arnold Biederman : il se hâta donc d’aller lui conter sa triste histoire et de lui demander assistance.

Du haut d’une colline qu’il atteignit peu de minutes après avoir quitté Rudolphe et l’avant-garde, il aperçut au bas le vénérable landamman et ses collègues accompagnés d’un certain nombre de jeunes gens qui ne se dispersaient plus sur les flancs de la troupe, mais l’escortaient régulièrement et en ordre de bataille, comme des gens prêts à repousser toute attaque subite.

Derrière venaient une mule ou deux chargées de bagages, puis les