Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/222

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est engoué de ces deux colporteurs anglais, et il n’écoutera point d’autres conseils que les leurs ; mais toi et moi, nous savons, mon cher Rudiger, que des hommes tels que ceux-là ne sont pas faits pour donner des lois à des Suisses nés libres. Tâche de retrouver les friperies qu’on leur a volées le plus promptement que tu pourras, et, au nom du ciel, fais-leur continuer leur route. »

Rudiger répondit par un signe d’intelligence, et alla offrir ses services pour hâter le départ du vieux Philipson. Il trouva le sagace marchand aussi désireux d’échapper à la scène de confusion que présentait alors la ville, que le jeune Suisse lui-même était impatient de le voir plier bagage. Seulement il attendait qu’on lui rendît la cassette dont d’Hagenbach l’avait dépouillé, et Rudiger Biederman ordonna tout de suite une minutieuse recherche, qui devait plus probablement être suivie de succès, car la simplicité des Suisses les empêchait de connaître la valeur du contenu. Une perquisition scrupuleuse et immédiate fut aussitôt opérée également sur le cadavre d’Hagenbach ; mais le précieux paquet ne fut pas plus retrouvé sur lui que sur tous les individus qui l’avaient approché lors de l’exécution, ou qui étaient supposés jouir de sa confiance.

Le jeune Arthur Philipson aurait avec le plus grand plaisir profité de ce peu d’instants pour dire adieu à Anne de Geierstein ; mais on n’apercevait plus le manteau gris dans les rangs des Suisses, et il était raisonnable de penser que, dans le tumulte qui avait suivi l’exécution d’Archibald et la retraite des chefs du petit bataillon, elle s’était elle-même retirée dans quelqu’une des maisons voisines, tandis que les soldats qui l’entouraient, et que ne retenait plus la présence de leurs commandants, s’étaient dispersés, les uns pour chercher les objets de prix qui avaient été enlevés à l’Anglais, les autres sans doute pour participer aux réjouissances de la victorieuse jeunesse de Bâle, ainsi qu’à celles des bourgeois de La Ferette, par qui les fortifications de la ville avaient été si heureusement livrées. Il s’éleva alors parmi eux un cri général pour que La Ferette, si long-temps considérée comme la barrière des confédérés suisses et l’obstacle de leur commerce, fût désormais occupée par une garnison helvétique, destinée à les protéger contre les empiétements et les exactions du duc de Bourgogne et de tous ses officiers. Toute la ville était plongée dans le désordre, mais c’était celui de la joie, et les citoyens rivalisaient les uns avec les autres pour offrir aux Suisses toute espèce de rafraîchissements ; et la jeunesse qui escortait la députation s’empressait gaîment, et avec un air de triomphe,