Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/288

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courent sur son compte, et qui épouvantent toute personne qui pourrait venir en troubler la retraite. — Et néanmoins vous osez y résider ? » dit l’Anglais, se rappelant l’histoire que lui avait racontée Rudolphe Donnehugel, relativement à la réputation des barons d’Arnheim, et à la catastrophe finale de la famille.

« Peut-être, répliqua son guide, sommes-nous trop bien instruits de la cause de ces terreurs pour qu’elles aient beaucoup d’empire sur nous… Peut-être avons-nous, pour braver ces frayeurs prétendues, des moyens propres à nous-mêmes… Peut-être, et ce n’est pas la conjecture la moins vraisemblable, n’avons-nous pas le choix d’un meilleur lieu de refuge. Tel semble être aussi votre destin pour le moment, monsieur ; car les cimes des montagnes éloignées perdent peu à peu les lueurs du soir ; et si vous ne restez pas à Arnheim, content ou non, il est probable que vous ne trouverez pas un logement sûr, même d’ici à plusieurs milles. »

Comme elle parlait ainsi, elle quitta Arthur ; et prenant, avec le chasseur qui l’accompagnait, un sentier rapide mais court qui montait en ligne droite à la plate forme du château, elle fit en même temps au jeune Anglais signe de suivre le chemin des chevaux qui, décrivant un circuit, aboutissait au même endroit, et, quoique moins direct, était beaucoup plus facile.

Il arriva bientôt devant la façade méridionale du château d’Arnheim, qui était un édifice bien plus considérable qu’il ne se l’était imaginé d’après la description de Rudolphe, ou par ce qu’il en avait aperçu de loin. Il avait été bâti à différentes époques, et une grande partie des constructions était moins dans le véritable style gothique que dans celui qu’on a appelé style mauresque, et où l’imagination de l’architecte se montre plus brillante que dans l’architecture ordinairement adoptée dans le Nord, riche en minarets, en coupoles, et en imitations semblables des édifices orientaux. Ce singulier château offrait un aspect général de désolation et de solitude : mais Rudolphe avait été mal informé quand il disait qu’on ne voyait plus que des ruines. Au contraire, il avait été entretenu avec un soin remarquable, et quand il tomba entre les mains de l’empereur, quoique aucune garnison ne fût placée dans l’intérieur des murs, l’ordre fut donné d’y faire les réparations convenables ; et, quoique les préjugés des gens de la campagne les empêchassent de jamais passer une nuit dans ces redoutables murailles, néanmoins le château était régulièrement visité par une personne qui avait à cet effet une commission de la chancellerie impériale. Les