Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/340

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res de votre méchante île doivent intéresser tout le monde autant que vous-mêmes ; mais ni ceux d’York, ni ceux de Lancastre, ni mon frère Blackburn, ni ma cousine Marguerite d’Anjou, même avec John de Vere, pour la soutenir, ne parviendront à m’abuser. On ne leurre pas le faucon avec des mains vides. »

Oxford familier avec le caractère du duc le laissa se déchaîner à loisir contre l’insolence de quiconque prétendrait diriger sa conduite, et lorsqu’il garda enfin le silence, il répondit avec calme ; « Faut-il que je vive pour entendre le duc de Bourgogne, le miroir de la chevalerie européenne, dire qu’on ne l’a engagé par aucune bonne raison à seconder une entreprise où justice doit être rendue à une reine abandonnée… où une royale maison doit être relevée de la poussière ? N’y a-t-il point là los et honneur immortels ? La trompette de la Renommée ne doit-elle pas proclamer le nom du souverain qui seul dans un siècle dégénéré a su unir les devoirs d’un généreux chevalier à ceux d’un prince indépendant ?… »

Le duc l’interrompit en lui frappant en même temps sur l’épaule… « Et les cinq cents musiciens du roi René pour racler à ma louange leurs maudits violons ? Et le roi René lui-même pour les écouter et pour dire : « Bien combattu, duc !… bien joué, musicien ! » Je vous le déclare, John d’Oxford, quand nous portions vous et moi une armure vierge, des mots tels que renommée, honneur, los, gloire de chevalier, amour des dames et autres semblables étaient d’excellentes devises pour nos boucliers blancs comme la neige, et d’assez bons arguments pour rompre des lances… oui, et aujourd’hui même en champ clos, quoique un peu vieux pour ces vaillantes folies, j’exposerais encore ma personne dans une semblable querelle, comme il convient à un chevalier de l’ordre ; mais quand il s’agit de débourser des couronnes et d’embarquer de nombreux encadrons, nous devons pouvoir donner à nos sujets quelque excuse valable pour les engager ainsi dans une guerre, alléguer un motif d’intérêt public… ou un avantage à nous personnel, ce qui, par saint George, est la même chose. Voilà le chemin que prend tout le monde, et pour vous dire franchement la vérité, Oxford, c’est aussi celui-là que je veux suivre. — À Dieu ne plaise que je m’attende à voir Votre Altesse agir autrement que pour augmenter le bien-être de vos sujets… c’est-à-dire pour accroître, comme Votre Grâce l’a si bien dit, votre propre puissance, vos propres domaines. L’argent que nous demandons n’est pas un simple cadeau, mais un prêt ; et Marguerite consent à laisser en gage