Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/48

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noble pour le craindre. Sur ces boucles de cheveux, ornement naturel et si gracieux de la beauté… ou, devrais-je plutôt dire, au milieu d’elles… était placé le petit bonnet qui par sa forme n’était guère propre à protéger la tête, mais servait à montrer le bon goût de la jolie fille qui le portait, et qui n’avait pas manqué, suivant la coutume dominante parmi les coquettes de la montagne, de décorer ce petit bonnet d’une plume de héron. Elle y avait joint le luxe alors extraordinaire d’une chaîne d’or petite et mince, assez longue pour faire quatre à cinq fois le tour de sa tête, et dont les bouts étaient réunis à un large médaillon de ce même métal précieux.

J’ai seulement à ajouter que la taille de la jeune personne dépassait un peu la grandeur habituelle, et que tout l’extérieur de son corps, sans qu’elle eût le moins du monde l’air masculin, ressemblait à celui de Minerve, plutôt qu’à la majestueuse beauté de Junon, ou aux grâces faciles de Vénus. Un front noble, des membres bien formés et robustes, un pas ferme et pourtant léger…. surtout l’absence totale de tout ce qui pouvait ressembler à une conviction de la beauté personnelle ; enfin, un regard franc et ouvert qui paraissait désirer ne rien savoir de caché, et dire qu’elle n’avait rien à cacher elle-même, n’étaient pas des traits indignes de la déesse de la sagesse et de la chasteté.

La route que suivait le jeune Anglais, guidé par cette charmante jeune fille, était difficile et inégale, mais ne pouvait être appelée dangereuse, en comparaison du moins des précipices qu’Arthur avait déjà franchis. C’était en effet une continuation du sentier que l’éboulement, ou plutôt la chute des terres si souvent mentionnée, avait interrompu ; et quoiqu’il eût été aussi endommagé en plusieurs endroits à l’époque du même tremblement de terre, pourtant des traces récentes montraient qu’on y avait déjà fait des réparations ; elles étaient grossières sans doute, mais suffisantes pour rendre le chemin de nature à paraître excellent à des gens aussi indifférents que les Suisses pour les routes commodes et unies. La jeune fille fit comprendre aussi à Arthur que le sentier qu’ils parcouraient ensemble faisait un circuit pour rejoindre celui qu’il avait peu avant suivi avec ses compagnons de voyage ; et que, s’ils eussent détourné à l’endroit où cette nouvelle route se réunissait à l’ancienne, ils auraient évité le péril qu’ils avaient couru en passant au bord du précipice.

Le sentier qu’ils suivaient alors s’éloignait un peu du torrent,