Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/71

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sien ? — Avec nos bonnes épées. — Revêtus de nos armures, ou comme nous sommes ? — Comme nous sommes plutôt. Je n’ai pas d’autre cotte d’armes que ce pourpoint… d’autre armure que mon épée, et je crois, monsieur le Suisse, que c’est plus qu’il ne m’en faut… Le lieu et l’heure, s’il vous plaît ? — Dans la cour du vieux château de Geierstein, au lever du soleil… mais on nous espionne… J’ai perdu ma gageure, étranger, » ajouta-t-il en parlant à haute voix et d’un air indifférent, « puisqu’Ulrich a lancé sa pierre plus loin qu’Ernest. Voici mon gant pour gage que je n’oublierai pas le flacon de vin. — Et voici le mien pour gage que je le boirai gaîment avec vous. »

C’est ainsi qu’au milieu des amusements paisibles, quoique rudes, de leurs compagnons, ces deux jeunes écervelés parvinrent à satisfaire leurs dispositions ennemies l’un à l’égard de l’autre, en convenant d’une rencontre qui pouvait avoir une issue fatale.

CHAPITRE V.

LA PROMENADE.

… J’étais un de ces hommes qui aiment les rives fleuries et les troupeaux mugissants, les plaisirs simples et la vie sans faste des villageois, assaisonnée d’un doux contentement, plus que les salons où les convives s’en donnent à gagner la fièvre. Croyez-moi, il n’y eut jamais de poison dans une coupe d’érable.
Anonyme.

Laissant les jeunes gens se livrer à leurs jeux, le landamman d’Unterwalden et le vieux Philipson s’allèrent promener de compagnie, s’entretenant entre autres choses des relations politiques de la France, de l’Angleterre et de la Bourgogne, jusqu’à ce que leur conversation changeât de sujet lorsqu’ils passèrent sous la porte du vieux château de Geierstein, où s’élevait le donjon solitaire et délabré, entouré par les ruines des autres bâtiments.

« Ce château a dû être une orgueilleuse et superbe habitation dans son temps, dit Philipson. — Elle était fière et puissante en effet, la race qui l’occupa, répondit le landamman ; l’histoire des Geierstein remonte au temps des vieux Helvétiens, et leurs exploits passent pour avoir égalé leur illustre origine. Mais toute grandeur terrestre a une fin, et des hommes libres foulent aux pieds les ruines de leur château féodal, quoique jadis, de si loin