Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/114

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des obligations envers la sainte Église que vous impose votre titre de roi. — Mon père, » dit Robert quelque peu impatienté, « vous êtes trop péremptoire dans cette affaire, et vous devriez au moins attendre que nous ayons le temps d’y chercher remède. De tels disputes se renouvelèrent souvent pendant le règne de nos prédécesseurs, et notre royal et bienheureux aïeul, saint David, ne résigna point ses privilèges comme monarque, sans lutter pour les défendre, quoiqu’il fût engagé dans une querelle avec le saint-père lui-même. — Et c’est en quoi ce bon et grand roi ne se montra ni sage ni saint. Aussi fut-il livré à ses ennemis pour être vaincu et dépouillé, quand il leva son épée contre les bannières de saint Pierre, de saint Paul et de saint Jean de Béverley, dans la guerre de l’étendard. Ce fut bien lui qui, comme son homonyme le fils de Jessé, eut son péché puni en ce monde, et non enregistré contre lui pour le jour terrible du jugement. — Bien, bon prieur, bien, en voilà assez pour le moment : s’il plaît à Dieu, le saint-siège n’aura point à se plaindre de moi. J’en prends Notre-Dame à témoin ; je ne voudrais pas, pour la couronne que je porte, me charger la conscience du moindre mal fait à notre mère l’Église. Nous avons toujours craint que le comte de Douglas ne fût trop attaché à la gloire fugitive et aux avantages temporels, pour s’occuper autant qu’il le devrait des avantages qui concernent un monde futur. — Il n’y a pas long-temps encore, dit le prieur, que le comte s’est établi de force dans le monastère d’Aberbrotock avec mille hommes à sa suite, et que l’abbé fut contraint à lui fournir ce dont il avait besoin pour ses gens et leurs chevaux, et c’est là ce que le comte appelle jouir de l’hospitalité qu’il a droit d’exiger, parce que ses ancêtres ont contribué à la fondation du couvent. Assurément il vaudrait mieux rendre à Douglas ses terres que se soumettre à de telles excursions, qui ressemblent plutôt à la conduite licencieuse de brigands et de bandits montagnards qu’à celle d’un bon chrétien. — Les Douglas, » dit le roi avec un soupir, « sont d’une race à laquelle on ne peut dire non ; mais, père prieur, je suis peut-être moi-même un intrus du même genre ; car je séjourne depuis long-temps parmi vous, et ma suite, quoique bien moins nombreuse que celle de Douglas, l’est assez pourtant pour vous embarrasser, puisqu’il vous faut pourvoir à leur entretien journalier. Et quoique nous ayons ordonné d’aller au dehors chercher des provisions pour alléger vos charges, si cependant nous vous gênons, il serait convenable que nous par-