Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/140

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Son mécontentement retombait sur l’objet innocent de sa protection ; et il se disait intérieurement, en la regardant avec dédain : « Parcourir les rues de Perth avec cette reine de mendiants, moi, un digne bourgeois ! Cette pimpante mignonne compromettrait une réputation aussi bien que le reste de ses sœurs, et je serai joliment récompensé de ma chevalerie si cela vient aux oreilles de Catherine ; mieux vaudrait avoir tué un homme, fût-il le meilleur de Perth. Eh ! par mon marteau et mes tenailles ! je l’eusse fait à la moindre provocation plutôt que de colporter cette marchandise à travers la ville. »

Peut-être Louise soupçonna-t-elle la cause de l’inquiétude de son conducteur, car elle dit timidement et avec hésitation : « Digne monsieur, ne serait-il pas convenable que je m’arrêtasse un instant dans cette chapelle pour mettre ma mante ? — Hum ! c’est bien pensé, mon cœur, » dit l’armurier. Mais le moine intervint, et levant un doigt en signe de défense :

« La chapelle du pieux saint Madox, dit-il, n’est pas une loge où de vils jongleurs et des vagabondes font leur toilette ; je vais à l’instant te montrer un vestiaire plus convenable pour toi. »

La pauvre jeune femme baissa humblement la tête et se détourna de la porte de la chapelle avec le plus profond sentiment de sa basse condition. Son petit épagneul sembla comprendre aux regards et aux manières de sa maîtresse qu’ils étaient des intrus dans le lieu saint qu’ils parcouraient, et baissa les oreilles, balaya le pavé avec sa queue, tout en trottant doucement bien près des talons de Louise.

Le moine allait toujours sans s’arrêter ; ils descendirent plusieurs larges marches et s’enfermèrent dans un labyrinthe de passages souterrains faiblement éclairés. En passant auprès d’une porte basse et voûtée, le moine se retourna, et dit à Louise d’une voix toujours aussi sévère : « Voilà, fille folle ! voilà le cabinet de toilette où beaucoup d’autres avant vous ont déposé leurs vêtements ! »

Obéissant au moindre signal avec une soumission craintive, elle poussa la porte ; mais aussitôt elle recula de terreur. C’était un charnier à moitié rempli de crânes et d’os secs.

« J’ai peur de changer d’habits en ce lieu, et d’y rester seule, mais si vous l’ordonnez, mon père, votre volonté sera faite. — Enfant de la vanité, les restes que tu vois ne sont que les dépouilles mortelles de ceux qui, pendant leur vie, ont