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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/177

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ma fille ; car je pensais vous avoir depuis peu vue changer de résolution, et regarder avec quelque regret le monde dont vous étiez autrefois décidée à vous séparer. »

Catherine baissa la tête et rougit plus encore que la première fois, en répondant : « Vous-même, mon père, vous me conseillez d’ordinaire de ne point prendre le voile. — Et je ne vous y engage pas aujourd’hui, mon enfant ; le mariage est un état honorable, béni par le ciel comme un moyen régulier de perpétuer la race humaine ; et je ne lis point dans les Écritures ce que les livres, ouvrages des hommes, ont proclamé depuis, touchant la supériorité du célibat. Mais je crains pour vous, mon enfant, comme un père craindrait pour sa fille unique, que vous ne tombiez dans les bras d’un homme indigne de vous. Votre père, je sais, moins scrupuleux là-dessus que moi-même, approuve la recherche de ce tapageur, qu’on appelle Henri du Wynd. Il est riche, soit ; mais il hante la compagnie des fainéants et des débauchés ; c’est un spadassin qui verse le sang humain comme de l’eau. Un tel homme peut-il être le digne époux de Catherine ? et pourtant le bruit court qu’il est son fiancé. »

Les joues de la jeune fille de Perth, de rouges devinrent pâles, et de pâles redevinrent rouges ; tandis qu’elle se hâtait de répliquer : Je ne pense pas à lui ; ils est toutefois vrai que nous avons dernièrement échangé quelques politesses, d’abord parce qu’il est ami de mon père, et ensuite parce que, suivant la coutume de notre temps, il est mon Valentin. — Votre Valentin, mon enfant ! et votre modestie, votre prudence, se sont-elles évanouies avec la délicatesse naturelle de votre sexe, pour que vous osiez créer de semblables relations entre vous et un homme comme cet armurier ?… Croyez-vous que ce Valentin, un homme pieux, un évêque chrétien, ait approuvé jamais une inconvenante coutume, qui semble plutôt digne du temps où les païens adoraient Vénus ou Flore, alors que les mortels divinisaient leurs passions, et s’étudiaient à les exciter au lieu de les contenir ? — Mon père, » répondit Catherine d’un ton plus froid que celui dont elle avait parlé jusqu’alors au chartreux, « j’ignore pour quel motif vous me grondez aussi sévèrement de m’être conformée à l’usage autorisé par la coutume universelle et sanctionnée par mon père. Je ne puis que m’affliger de ce que vous pouviez à tel point vous méprendre sur mon compte. — Pardonnez-moi, ma fille, si je vous ai offensée, » répondit doucement le religieux ; « mais cet