Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/353

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Ernest d’Apulie, aussitôt que la quille de la galère de Tancrède avait touche le sable ; il fut alors planté au faîte du cap élevé, où Lascaris, Démétrius et d’autres bavards s’étaient établis au commencement de l’action, mais qu’ils avaient tous quitté en fuyant, doublement effrayés par les feux grégeois et par les traits des Latins.


CHAPITRE XXX.

LES DEUX OFFICIERS.


Revêtu d’une armure complète, et tenant de la main droite l’étendard de ses pères, Tancrède restait avec sa poignée de guerriers comme autant de statues de bronze, s’attendant à être attaqués par les troupes grecques qui occupaient la lice, ou par les habitants qui sortaient en foule des portes de la ville… quelques uns soldats, d’autres citoyens, et la plupart équipés comme pour combattre. Ces personnes, alarmées des divers bruits qui avaient couru sur les combattants et sur l’issue de l’affaire, se dirigèrent vers l’étendard du prince Tancrède, avec l’intention de le renverser et de disperser les Francs. S’il est parfois arrivé au lecteur de parcourir un pays de pâturages, suivi d’un chien de bonne race, il doit avoir remarqué dans la déférence forcée du chien de berger pour le noble animal, tandis qu’il traverse la vallée solitaire dont le premier s’imaginait être le seigneur et le gardien, quelque chose de semblable à la conduite des Grecs, quand ils approchèrent de la petite troupe des Francs. Au premier symptôme de l’arrivée d’un intrus, le chien de berger se réveille en sursaut et se précipite vers l’arrivant avec une bruyante déclaration de guerre ; mais quand la diminution de la distance montre à l’agresseur la taille et la force de son adversaire, il fait comme le croiseur, qui dans une chasse s’aperçoit, à sa grande surprise et à sa frayeur non moins grande, qu’il lui faut combattre un navire à deux ponts au lieu d’un. Il s’arrête, suspend ses bruyants aboiements, et enfin bat honteusement en retraite vers son maître, donnant les preuves les plus déshonorantes qu’il refuse positivement le combat.

Ce fut de cette manière que les troupes des Grecs tumultueux, avec force cris et force bravades, s’élancèrent de la lice et de la ville, avec l’intention de chasser les compagnons peu nombreux de Tancrède du lieu qu’ils occupaient. Mais lorsqu’ils se furent avan-