Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/46

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cour impériale, qui est la sphère des esprits supérieurs, ne ferait aussi bien par la force ouverte. Que penses-tu de cela, bon sauvage ? — Je pense, « répondit le Varangien, qui marchait à environ un pas et demi derrière son chef, comme un soldat d’ordonnance marche derrière l’épaule de son officier, « je pense que je serais fâché de me troubler la tête de ce que mon bras pourrait faire tout d’un coup. — N’est-ce pas ce que je disais ? répondit l’Acolouthos qui, s’étant éloigné de la Porte d’Or, marchait au clair de la lune le long des murailles, comme s’il cherchait une autre entrée : « telle est l’étoffe dont est faite ce que vous appelez votre tête ! Vos mains et vos bras sont des Achitophel parfaits en comparaison. Écoute-moi, toi, le plus ignorant de tous les animaux, et, par cette même raison, le plus sûr des confidents et le plus brave des soldats, je t’expliquerai l’énigme de cette affaire nocturne ; et cependant, même alors, je doute que tu puisses me comprendre. — Mon devoir, pour le moment, répondit le Varangien, est de tâcher de comprendre Votre Valeur, je voulais dire votre politique, puisque vous voulez bien condescendre jusqu’à me l’expliquer. Quant à votre valeur, ajouta-t-il, je serais bien malheureux, si je n’en connaissais pas déjà la longueur et la largeur. »

Le général grec rougit un peu, mais il répondit d’une voix assurée : « C’est vrai, mon bon Hereward, nous nous sommes vus sur le champ de bataille. »

Hereward, à ces mots, ne put retenir une toux légère, que les grammairiens du temps, habiles dans l’art d’employer les accents, auraient interprétée d’une manière peu flatteuse pour la bravoure de cet officier. Il est certain que, pendant tout le cours de cet entretien, la conversation du général, en dépit du ton de supériorité et d’importance qu’il affectait, annonçait évidemment pour l’inférieur le respect que l’on a pour un homme qui, dans l’action, s’est montré le plus brave. Les réponses du vigoureux guerrier du Nord, quoiqu’il ne s’écartât jamais de la discipline militaire, faisaient ressembler cette conversation à celle qui aurait pu avoir lieu avant la réforme introduite dans l’armée britannique par le duc d’York, entre ces officiers, ignorants damoiseaux, et un sergent instruit et expérimenté. On y apercevait de la part du soldat, sous les apparences du respect, un sentiment intime de supériorité que le général ne pouvait s’empêcher de reconnaître à demi.

« D’abord, mon très simple ami, » continua le chef sur le même ton qu’auparavant, « afin de te conduire par le plus court chemin