Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/291

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gardant sa montre ; « car il est dix minutes de plus que l’heure, et je ne vois pas de monsieur Tyrrel. — Que dites-vous là, docteur ? » s’écria le baronnet, ayant l’air de sortir de son apathie.

« Des choses qui n’ont pas le sens commun, docteur, » répliqua le capitaine en regardant un vieux chaudron de montre ; « il n’est pas plus d’une heure trois minutes, et je soutiendrais que M. Tyrrel est un homme de parole… Je n’ai jamais vu un homme prendre la chose avec plus de sang-froid. — Et sans doute il met le même sang-froid dans sa démarche en se rendant ici, ajouta le docteur. — Sur ma parole, dit Winterblossom, je crois que ce M. Tyrrel a le dessein de se moquer de nous. — Je ne l’attendrai pas plus d’une demi-heure, s’écria sir Bingo, fût-il feld-maréchal. — Vous vous laisserez diriger dans cette affaire par l’ami qui vous sert de second, sir Bingo, dit le capitaine. — Au diable si j’y consens, répliqua le baronnet. Ami ? un joli ami, qui me fait faire un tel pas de clerc ! Je ne vous aurais jamais cru assez borné pour venir m’apporter un rendez-vous de la part d’un misérable qui se sauve lâchement. — Si vous êtes fâché d’être venu ici pour rien, dit le capitaine, et si vous pensez que j’aie des torts envers vous, je ne ferai aucune difficulté de prendre la place de M. Tyrrel, et de vous rendre le service de me mesurer avec vous, mon garçon ! — Fi ! fi ! messieurs, » s’écria le pacifique Winterblossom. « Quoi ! l’une des parties et son second ! c’est ce dont on n’a jamais entendu parler. »

Cette observation fit rentrer en eux-mêmes les deux délinquants, et ils continuèrent tous à se promener de long en large. Enfin M. Winterblossom fit observer qu’il était une heure trois quarts ; que la personne qui prenait le nom de Tyrrel ne se présentait point ; qu’il convenait donc de rédiger par écrit le récit de cette affaire et des circonstances qui l’avaient accompagnée, de signer tous cette pièce, et de la rendre publique pour la satisfaction de la société.

En conséquence, procès-verbal fut dressé, portant en somme que, sur un cartel envoyé par sir Bingo Binks, baronnet, au sieur Francis Tyrrel, et accepté par ce dernier, les soussignés, s’étant rendus au Buckstane à une heure, y avaient attendu jusqu’à deux heures sans voir ledit Tyrrel ni entendre parler de lui, en foi de quoi, etc.

Le susdit procès-verbal fut affiché dans les dépendances de l’établissement avec une mesure législative votée par le comité d’admi-