Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Adieu donc, » dit Bertram en prenant congé de son prétendu fils : « compte que je ne resterai au château de Douglas que le temps absolument nécessaire pour y terminer l’affaire qui m’y amène, affaire relative au vieux livre que tu sais bien. Je reviendrai promptement te reprendre à l’abbaye pour m’en retourner avec toi dans notre pays. — mon père ! » répliqua le jeune homme avec un sourire, « je crains, si une fois vous entrez dans une belle et antique bibliothèque, que là, entouré de romans et de chroniques, vous n’oubliiez le pauvre Augustin et tout ce qui le concerne. — Ne redoute pas un pareil oubli, Augustin, » dit le vieillard en faisant un mouvement comme pour envoyer un baiser à son fils, « tu es bon et vertueux, et le ciel ne t’abandonnerait pas si ton père était assez dénaturé pour le faire. Crois-moi, toutes les vieilles chansons, même depuis l’époque de Merlin, ne parviendraient pas à t’effacer de mon souvenir. »

Ils se séparèrent donc, le ménestrel ainsi que le chevalier anglais et sa suite, pour se diriger vers le château, et le jeune homme, pour suivre respectueusement le vénérable abbé. Celui-ci fut tout ravi de reconnaître que les pensées de son hôte étaient plutôt tournées vers des choses spirituelles que vers le repas du matin, dont il ne pouvait lui-même s’empêcher de sentir l’approche.


CHAPITRE III.

LE MÉNESTREL ET LE CHEVALIER.


Cette nuit, me semble-t-il, est un jour malade : c’est un jour un peu pâle : c’est un jour sombre comme le jour l’est quand le soleil se cache.
Shakspeare. Le Marchand de Venise.


Pour que la petite troupe parvînt plus aisément et plus vite au château de Douglas, le chevalier de Valence offrit au ménestrel un cheval que les fatigues de la veille lui firent joyeusement accepter. Toutes les personnes qui connaissent l’équitation, savent que le meilleur moyen de faire disparaître le sentiment de la fatigue après une marche forcée, c’est de continuer la route à cheval ; car ainsi on met en exercice une autre espèce de muscles, et ceux qui sont restés tendus trop long-temps se reposent au moyen du changement de mouvement plus complètement qu’ils n’auraient pu le faire dans un repos absolu. Sir Aymer de Valence était revêtu de son armure et montait son cheval de guerre ; deux archers, un varlet