Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/337

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pagne. Dans cet embarras, il voulut encore tenter un nouvel effort auprès de sa sœur.

« Clara, lui dit-il, je suis, comme je vous l’ai déjà dit, votre seul parent, votre seul protecteur. Si quelque motif raisonnable vous empêche de recevoir le comte, et de repousser par un refus poli la proposition qu’il voulait vous adresser, assurément je puis demander à connaître ce motif. Cette liberté dont vous faites tant de cas, vous en avez trop joui durant la vie de mon père… les dernières années au moins… Avez-vous à cette époque formé quelque liaison qui s’oppose à ce que vous receviez la visite dont milord Étherington vous menace ? — Me menace ! le mot est bien choisi ; et rien ne peut être plus effrayant qu’une telle menace, excepté son accomplissement. — Je suis joyeux de voir que vous reprenez la liberté de votre esprit, répliqua son frère ; mais ce n’est pas là une réponse à ma question. — Est-il nécessaire, dit Clara, qu’on ait quelque engagement pour ne vouloir pas se marier, ou même pour ne vouloir pas être pressé sur un pareil sujet ? Beaucoup de jeunes gens déclarent qu’ils veulent mourir garçons : pourquoi, à vingt-trois ans, ne pourrais-je dire que je veux mourir fille ?… Laissez-moi vivre fille, comme un bon frère, et jamais neveux et nièces n’auront été caressés, grondés et gâtés par leur vieille tante, autant que vos enfants, quand vous en aurez, le seront par leur tante Clara. — Et pourquoi ne pas dire tout cela à lord Étherington, répondit Mowbray ; attendez qu’il vous présente le terrible épouvantail du mariage avant de vous effrayer de le revoir. Qui sait ? le caprice dont il est question peut être déjà passé… Il se promenait, comme vous savez, avec lady Binks, et cette dame possède autant d’adresse que de beauté. — Puisse le ciel augmenter l’une et l’autre ! et c’est bien sincèrement que je le souhaite, si ces qualités peuvent lui servir à garder lord Étherington pour elle-même ! — Eh bien donc, puisque les choses sont ainsi, je ne pense pas que vous ayez beaucoup d’embarras avec le comte, pas plus qu’il n’en faudra pour lui signifier un refus poli. Après avoir entretenu sur un pareil sujet un homme de ma condition, il ne peut plus reculer sans que vous lui fournissiez un prétexte. — Si c’est là tout ce qu’il désire, soyez certain qu’aussitôt qu’il m’en donnera l’occasion, il recevra une réponse qui le mettra en liberté de faire la cour à telle fille d’Ève qu’il lui plaira, à l’exception de Clara Mowbray. En vérité, je désire tellement rendre ce captif libre, que maintenant je suis impatiente de le voir arriver, autant que je le redoutais tout à l’heure. — Oh ! douce-