Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/344

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peu brusquement ; et, dans les circonstances où nous sommes elle et moi, il y a toujours un peu de gaucherie dans une première entrevue, quand il ne se trouve point de tiers pour remplir le rôle de maître des cérémonies. Je soupçonne, à l’air de votre sœur, que vous n’avez pas tout-à-fuit gardé mon secret, mon cher ami. Moi-même… il m’a semblé que j’étais un peu embarrassé en approchant de miss Mowbray… mais la glace une fois brisée, j’espère avoir des occasions fréquentes de voir votre aimable sœur. — Soit ; mais comme vous parlez de nous quitter à l’instant même, il faut auparavant que je vous dise un mot, et nous ne sommes pas convenablement ici pour causer. — Je ne puis vous refuser, mon cher John, » dit Étherington en le suivant avec un tressaillement secret, pareil peut-être à celui de l’araignée quand elle voit sa toile perfide menacée d’être détruite, et que, suspendue au centre, elle examine tous les points, incertaine de celui qu’elle doit d’abord défendre. C’est une partie du châtiment de ceux qui, abandonnant le droit chemin, s’efforcent d’arriver à leur but par la fraude et l’intrigue.

« Milord, » dit Mowbray lorsqu’il l’eut conduit dans un petit appartement où il renfermait ses fusils, ses lignes et les autres instrumens de ce genre, vous avez joué cartes sur table avec moi ; je suis obligé même de convenir que vous m’avez donné de grands avantages. Je n’ai donc aucun droit d’écouter des rapports préjudiciables à la réputation de Votre Seigneurie, sans vous les communiquer sur-le-champ. Voici une lettre anonyme que je viens de recevoir. Peut-être Votre Seigneurie connait-elle l’écriture, et pourra-t-elle le ainsi en découvrir l’auteur. — Je reconnais l’écriture, » dit le comte en prenant la lettre des mains de Mowbray, « et j’ose dire que l’auteur est le seul être au monde qui pouvait avoir l’audace de répandre des calomnies à mon préjudice. J’espère, monsieur Mowbray, qu’il vous est impossible de regarder cette infâme accusation comme autre chose qu’une fausseté. — En remettant ce billet entre vos mains, sans plus ample information, je prouve suffisamment que je n’y vois que des mensonges, milord ; et en même temps, je ne doute pas que Votre Seigneurie ne soit à même de détruire une si futile calomnie par les preuves les plus éclatantes. — Certainement, monsieur Mowbray, dit le comte ; car outre que je suis en pleine possession du domaine et du titre de mon père, dernier comte d’Étherington, j’ai son contrat de mariage, mon propre certificat de naissance et le témoignage de tout le pays, pour établir mon droit : toutes pièces qui seront produites dans le plus bref