Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/367

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pose d’intenter est de faire valoir mes très justes droits. — Au fond, cela revient au même ; je ne suis pas appelé à décider sur la justice de vos réclamations ; mais elles sont, vous l’avouerez, de date un peu récente. La feue comtesse d’Étherington est morte en possession incontestée de son rang dans le monde. — Si elle n’y avait pas un droit réel, monsieur, elle a obtenu bien plus que justice, puisqu’elle en a si long-temps joui, et l’épouse malheureuse a été d’autant plus injustement dépouillée… Mais c’est un point qui ne doit pas être discuté entre vous et moi : il en sera décidé ailleurs. — Des preuves, monsieur, des preuves bien fortes seront nécessaires pour renverser un droit aussi bien établi dans l’opinion publique que celui du possesseur actuel du nom d’Étherington. »

Tyrrel tira un papier de son portefeuille, et le passant au capitaine Jekill, il se contenta d’ajouter : « Je ne songe pas à vous demander d’abandonner la cause de votre ami ; mais il me semble que les documents dont je vous remets la liste peuvent ébranler votre opinion. »

Le capitaine lut à demi-voix : « Certificat de mariage délivré par le révérend Zadock Kemp, chapelain de l’ambassade anglaise à Paris, entre Marie de Belleroche, comtesse de Martigny, et le très honorable John lord Oakendale… Lettres de John, comte d’Étherington, et de son épouse, sous le titre de madame de Martigny… Acte de naissance… Déclaration du comte d’Étherington à son lit de mort… Tout ceci est fort bien… mais puis-je vous demander, monsieur Tyrrel, si vous avez réellement l’intention d’en venir à des extrémités avec votre frère ? — Il a oublié qu’il est un… il a voulu attenter à ma vie. — Vous avez répandu deux fois son sang… Le monde ne demandera point lequel des deux frères a offensé l’autre, mais lequel a porté la plus dangereuse blessure. — Votre ami m’en a porté une, monsieur, qui saignera tant que j’aurai la faculté de me souvenir. — Je vous comprends, monsieur, vous faites allusion à l’affaire de miss Mowbray. — Épargnez-moi sur ce sujet, capitaine. Jusqu’ici j’ai discuté avec une espèce de calme mes droits les plus importants… droits qui établissent mon rang dans la société, ma fortune et l’honneur de ma mère… Mais n’ajoutez pas un seul mot sur le sujet que vous avez touché, à moins que vous n’ayez envie de me voir perdre la raison. Vous est-il possible, monsieur, d’avoir entendu le moindre récit de cette histoire et d’imaginer que je puisse jamais songer au piège abominable que votre ami tendit à deux infortunés, sans… » Il se leva en tressaillant, et marcha im-