formément aux croyances de cette époque, où les lois contre les sorciers étaient en vigueur, et avaient même été récemment mises à exécution, on pensait que c’était dans de tels endroits que les mauvais esprits avaient le pouvoir de se rendre visibles aux yeux des hommes, et d’exercer de l’influence sur leurs cœurs et leurs sens. De violents soupçons assiégèrent l’esprit de Butler, qu’aucun raisonnement préalable n’avait préparé à rejeter ce que croyait tout homme de son temps, de son pays et de sa profession. Toutefois son bon sens repoussait ces vaines idées comme opposées, sinon à l’ordre des choses possibles, mais aux lois générales qui gouvernent le monde, et dont le dérangement, comme le pensait très-bien Butler, ne peut être admis que sur la plus entière et la plus incontestable évidence. Cependant la pensée d’un amant, d’un jeune homme ayant droit, par quelque motif que ce fût, d’exercer une autorité aussi impérieuse et avec aussi peu de ménagement, sur l’objet d’un amour ancien, d’un amour qui paraissait sincèrement payé de retour, n’était pas moins capable de l’effrayer que les chimères de la superstition.
Le corps harassé de fatigue, l’esprit accablé par l’inquiétude, en proie aux réflexions et à l’anxiété la plus pénible, Butler monta de la vallée au rocher de Saint-Léonard, et se présenta à la porte de la demeure de Deans, avec des sentiments analogues aux craintes et aux chagrins de ceux qui l’habitaient.
CHAPITRE XII.
L’ENTRETIEN.
« Entrez, » dit au moment où Butler frappa à la porte, la voix douce qu’il avait le plus de plaisir à entendre. Il leva le loquet, et se trouva sous le toit de l’affliction. Jeanie ne put que jeter un regard sur son amant, qu’elle revoyait dans des circonstances si pénibles