Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/284

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Et en parlant ainsi, elle s’empressait de mettre tout en ordre avec May Hetly.

La soirée était déjà avancée quand tout fut terminé et quand elles eurent pris quelque nourriture, la première que Jeanie eût goûtée dans toute cette pénible journée. May Hetly, qui résidait habituellement dans une petite chaumière voisine de l’habitation de Deans, demanda à sa jeune maîtresse de la laisser passer la nuit avec elle dans la maison. « Vous avez eu une journée terrible, dit-elle, et le chagrin et l’inquiétude sont de mauvais compagnons pendant les veilles de la nuit, comme je l’ai entendu dire au digne homme lui-même. — Ce sont en effet de mauvais compagnons, mais il faut que je m’habitue à leur présence… Eh ! mieux vaut commencer dans la maison qu’en plein champ, aujourd’hui que demain. »

En conséquence elle renvoya la vieille femme, car la différence entre leurs rangs était si légère, que nous ne pouvons guère appeler May sa domestique, et elle s’occupa des préparatifs de son voyage.

La simplicité de son éducation et des habitudes de la campagne rendaient ces préparatifs très-faciles et très-prompts. Son plaid écossais lui servait en même temps d’habit de voyage et de parapluie, et un très-petit paquet contenait le peu de linge dont elle avait besoin.

Elle était venue au monde nu-pieds, comme le dit Sancho, et c’était nu-pieds qu’elle se proposait d’accomplir son pèlerinage, réservant ses souliers neufs et ses bas de fil d’une blancheur éclatante pour des occasions de cérémonie. Elle ne se doutait pas que dans les habitudes et les notions qu’on avait en Angleterre sur ce qui est nécessaire ou commode à la vie, un voyageur qui marcherait nu-pieds y donnerait l’idée de la misère la plus abjecte ; et si on lui eût objecté le manque de propreté de cette coutume, elle aurait pu s’en justifier par l’habitude qu’ont les Écossaises décemment élevées de faire des ablutions presque aussi fréquentes que les sectateurs de Mahomet : ainsi donc jusque-là tout allait bien.

Dans une espèce d’armoire de chêne, où son père gardait quelques vieux livres, deux ou trois liasses de papiers, outre ses comptes et ses reçus, elle chercha et réussit à trouver dans un de ces paquets, parmi des extraits de sermons, des comptes d’intérêt, des copies des dernières paroles des martyrs, et autres papiers de ce genre, deux ou trois pièces qu’elle jugea devoir lui