Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/552

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moins un sentiment de repentir que l’espoir d’obtenir de George Staunton ou de son père quelques moyens d’existence pour sa fille Madge. Sa lettre disait « que tant que celle qui l’écrivait aurait vécu, sa fille n’aurait eu besoin de personne, et qu’elle ne se serait jamais mêlée de cette affaire, excepté pour rendre à George le mal qu’il avait fait à elle et aux siens. Mais elle allait mourir, et sa fille restait dans le dénuement le plus absolu, et incapable de se guider. Elle avait passé assez d’années dans le monde pour savoir qu’on n’y faisait jamais rien pour rien ; elle avait donc dit à George Staunton tout ce qu’il pouvait désirer savoir au sujet de son enfant, dans l’espoir qu’il ne laisserait pas périr de misère la malheureuse insensée dont il avait causé la ruine. Quant aux motifs qu’elle avait eus de lui cacher si long-temps son ressentiment, elle avait un long compte à rendre de sa vie dans l’autre monde, et ils y figureraient. »

L’ecclésiastique dit que Meg avait reçu la mort dans le même endurcissement de cœur, exprimant parfois un regret du sort de l’enfant, mais regrettant bien plus encore que la mère n’eût pas été pendue. Son âme offrait un effrayant chaos où se confondaient toutes les passions criminelles, le désespoir, la rage, auxquels se mêlait l’inquiétude que lui inspirait l’avenir de sa fille. C’était une espèce d’instinct d’anxiété maternelle qu’elle partageait avec la louve et la lionne, et l’unique et dernière trace d’affection qu’on pût découvrir dans un naturel non moins féroce.

La triste catastrophe qui termina les jours de Madge Wildfire vint de ce qu’elle avait profité de la confusion qu’avait excitée l’exécution de sa mère, pour quitter la maison de travail où l’ecclésiastique l’avait envoyée, et pour se présenter à la populace en fureur, dans les mains de laquelle elle trouva la mort, comme nous l’avons déjà dit. Lorsque le docteur Fleming se vit renvoyer du Lincolnshire la lettre de la criminelle, il écrivit à un ami qu’il avait à Édimbourg pour s’informer du sort de la malheureuse fille dont l’enfant avait été enlevé, et il apprit de son correspondant qu’elle avait eu sa grâce, et qu’elle s’était retirée, avec toute sa famille, dans quelque partie éloignée de l’Écosse, ou avait peut-être entièrement quitté le royaume. Les choses en étaient restées là jusqu’à ce moment ; et, à la requête de sir George Staunton, l’ecclésiastique chercha parmi ses papiers la lettre de Marguerite Murdockson, qu’il lui remit avec les autres notes qu’il avait prises sur cette affaire.