Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/64

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tée par le gouvernement. La chaleur de la dispute avait excité une soif si universelle, que la moitié des jeunes avocats et des procureurs, tous leurs clercs avec eux, avaient été continuer les débats dans quelque taverne favorite. Or c’était parmi ces gens-là que Butler cherchait un conseiller. Un habile arithméticien calcula que cette discussion avait fait consommer, dans Édimbourg, une quantité de bière à deux sous suffisante pour mettre à flot un vaisseau de ligne du premier rang.

Butler attendit l’obscurité pour aller voir la malheureuse jeune fille, afin d’être remarqué le moins possible ; car il avait ses raisons pour désirer que mistress Saddletree ne fût pas instruite de sa visite, et la porte de sa boutique n’était pas fort éloignée de celle de la prison, quoique de l’autre côté de la rue ou au midi, et un peu plus haut. Il passa donc par la galerie étroite et en partie couverte qui communique avec l’extrémité nord-ouest de Parliament-Square.

Il se trouva alors devant l’entrée gothique de l’ancienne prison qui, comme chacun sait, déploie son antique façade au milieu de High-Street, et termine une longue file de hauts bâtiments[1] que nos ancêtres, pour quelque raison inconcevable, ont entassés au centre de la principale rue de la ville, ne laissant pour la circulation qu’une rue étroite vers le nord et vers le midi : c’est dans cette rue que se trouve la porte de la prison. Les hautes et sombres murailles de la Tolbooth et les maisons adjacentes d’un côté ; de l’autre les piliers et les arcs-boutants de la vieille cathédrale, forment une ruelle tortueuse. Pour donner quelque gaieté à ce sombre passage (bien connu sous le nom du Krames), un grand nombre de petites boutiques, semblables à des échoppes de savetiers, sont accrochées, pour ainsi dire, dans les enfoncements et autour des piliers, si bien que les marchands semblent avoir bâti dans tous les coins et recoins des nids proportionnés à la grandeur de l’édifice, comme les hirondelles dans le château de Macbeth. Depuis quelque temps, ces boutiques sont occupées par des marchands de jouets d’enfants, devant l’étalage desquels les petits paresseux qui aiment tant ces belles choses sont tentés de s’arrêter, ravis par le riche coup d’œil des chevaux de bois, des poupées et des joujoux de Hollande, qu’on dispose à dessein avec un charmant désordre ; mais les regards de travers d’un marchand hideux ou d’une vieille femme en lunettes, préposés

  1. Les Luckenbooths. a. m.