Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/64

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— Vous croyez me comprendre, Wilkin ; mais voici la difficulté : qui de nous voudra se fier à l’autre ?

— Oses-tu bien m’adresser une telle question, répondit Jorworth ; quoi ! mettrais-tu donc en doute la foi de Gwenwyn, du prince de Powys ?

— Je ne connais ses intentions que par toi, mon cher Jorworth ; et je sais que tu n’es pas de ceux qui refuseraient de promettre, craignant en donnant leur foi de commettre un parjure.

— Aussi vrai que je suis un chrétien, » dit Jorworth, entassant serments sur serments, « par l’âme de mon père, par la foi de ma mère, par la croix noire de…

— Arrête, arrête, bon Jorworth, dit le Flamand, tu entasses trop de serments à la fois pour que j’y puisse croire. On ne pense pas toujours devoir accomplir ce que l’on promet d’une façon si légère. Crois-moi, je préférerais à tes serments sans nombre l’accomplissement soudain de quelques-unes de tes promesses.

— Homme méfiant et grossier, oses-tu douter de ma parole ?

— Non, pas précisément, répondit Wilkin ; je serais plus porté à croire tes actions.

— Parle Flamand, dit Jorworth, que veux-tu que je fasse ?

— Que je puisse voir au moins l’argent que tu m’as promis, et alors je penserai à ta proposition.

— Être vil et sans foi, répondit Jorworth, penses-tu que le prince de Powys possède autant de sacs d’argent que les marchands dont ton pays fourmille ? Mon maître recueille des trésors par ses conquêtes, comme la trombe qui aspire l’eau par la force dont elle est douée ; mais ces trésors, il les répand au milieu de ses vassaux, comme la trombe rend à la terre et à l’Océan l’eau qu’elle avait aspirée. L’argent que je t’ai promis doit être pris dans les coffres des Saxons. Le trésor de Berenger le fournira.

— Il me semble que je pourrais le prendre moi-même, étant maître du château : ce serait une peine que je vous éviterais, dit le Flamand.

— C’est vrai, répondit Jorworth ; mais ce serait aux dépens d’une corde et d’un nœud, soit que les Gallois s’emparassent de la place, soit que les Normands la secourussent : ceux-là s’attendant à trouver intact leur butin, ceux-ci à ne pas trouver incomplets les trésors de leurs compatriotes.

— Je ne prétends pas nier cela, dit le Flamand ; mais en supposant que tu m’inspirasses assez de confiance sous ce rapport, pourquoi