Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/74

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qu’à son caractère spirituel, et prononça ces mots : « Wilkin Flammock, je te fais prisonnier pour trahison envers ta souveraine. » Il allait le saisir si le Flamand ne se fût reculé de quelques pas et ne lui eût fait un geste menaçant et déterminé. « Vous êtes atteints de folie, vous autres Anglais ; vous devenez fous dans la pleine lune, et ma sotte de fille est attaquée de votre maladie. Lady Éveline, votre honoré père m’a confié un poste important ; j’exécuterai ses ordres dans l’intérêt de tous ; et vous ne pouvez, étant mineure, me dépouiller de l’emploi que j’exerce. Quant à vous, père Aldrovand, apprenez qu’un moine ne peut arrêter légalement. Roschen, ma fille, taisez-vous, séchez vos pleurs ; vous êtes folle, vous dis-je.

— Oui, certes, je le suis, s’écria Rose, séchant ses larmes et se livrant de nouveau à toute l’élasticité de son caractère. » Oui, je le suis, et pis que cela, puisque j’ai douté un instant de la probité de mon père. Mettez votre confiance en lui, ma chère maîtresse, il est sage, quoique grave, et bon, quoique simple dans ses discours. S’il eût été perfide et traître, il eût été le premier puni ; car je me serais précipitée du haut de la grande tour dans les fossés du château, et il eût perdu sa fille chérie pour avoir trahi sa maîtresse.

— Tout cela est frénésie, dit le moine. Comment se fier aux traîtres lorsqu’ils avouent leurs crimes ? Normands, Anglais, accourez au secours de votre suzeraine ; vos arcs, vos lances !

— Bon père, dit le Flamand, ménagez votre voix pour votre prochaine homélie ; ou appelez en bon flamand, puisque vous le connaissez, car ceux qui sont à la portée de votre voix ne répondront pas à un autre langage. »

Il s’approcha alors de lady Éveline d’un air de bienveillance réelle ou affectée, voisine de la courtoisie autant que ses manières et ses traits étaient susceptibles d’en montrer. Il lui souhaita le bonsoir, et, après lui avoir assuré qu’il agirait pour le mieux, il sortit de la chapelle. Le moine allait encore l’accabler de reproches et d’injures ; mais Éveline, avec plus de prudence, réprima son zèle.

« Tout me porte à croire, dit-elle, que cet homme a de bonnes intentions.

— Que les bénédictions du ciel vous accompagnent, ma chère maîtresse, pour ces paroles, » dit Rose, l’interrompant vivement et lui baisant la main.