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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/317

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souverain ; mais je veux ne devoir mes partisans qu’à l’amitié et à la conviction. Si monsieur Waverley préfère continuer son voyage vers le sud, je signerai son passeport, il a toute liberté de partir ; je regrette seulement d’être aujourd’hui dans l’impuissance de le garantir des dangers probables d’une telle démarche ; mais, » continua Charles-Édouard après une nouvelle pause, « si monsieur Waverley, comme son aïeul sir Nigel, voulait embrasser une cause qui ne se recommande encore que par sa justice, et suivre un prince qui s’en remet à l’affection de son peuple pour reconquérir le trône de ses pères ou périr en voulant y remonter, je puis dire qu’il trouvera de dignes associés pour cette généreuse entreprise parmi les nobles et vaillants seigneurs, et qu’il servira un souverain qui peut être malheureux, mais qui ne sera jamais ingrat. »

Le chef de la tribu d’Ivor avait senti, en politique habile, qu’il travaillait pour lui en ménageant à Waverley une entrevue privée avec le royal aventurier. Notre héros ne connaissait ni le langage ni les manières d’une cour polie ; aussi les discours et la bonté de Charles, qui les connaissait si bien, allèrent droit à son cœur, et lui firent rejeter les conseils de la prudence. Être ainsi personnellement sollicité comme défenseur par un prince dont la figure et les sentiments, non moins que son courage dans cette singulière entreprise, répondaient à ses idées d’un héros de roman ; être reçu par lui dans les antiques appartements de son palais paternel, reconquis à la pointe d’une épée qui allait faire de nouvelles conquêtes : tout cela rendit à Édouard et à ses propres yeux la dignité et l’importance qu’il avait cessé de regarder comme ses attributs. Rejeté, calomnié, menacé par un parti, il était irrésistiblement enchaîné à la cause que des préjugés d’éducation et les principes politiques de sa famille lui avaient déjà recommandée comme la plus juste. Ces réflexions traversèrent son esprit comme un torrent, chassant devant elles toute autre considération. De plus, il fallait se décider à l’instant ; et Waverley, tombant aux genoux de Charles-Édouard, voua son cœur et son épée à la défense de ses droits.

Le prince (car, quoique malheureux par les fautes et les folies de ses ancêtres, nous lui donnerons ici comme ailleurs le titre dû à sa naissance) releva Waverley, et l’embrassa avec un transport de joie trop vif pour ne pas être sincère. Il remercia aussi plus d’une fois Fergus Mac-Ivor de lui avoir trouvé un tel