Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/199

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core roide et engourdi, tant par le froid que par la position gênée et contrainte dans laquelle il s’était trouvé toute la nuit ; cependant il suivit l’Égyptienne, et la marche et l’air frais du matin rendirent la souplesse à ses membres engourdis en y ramenant la circulation.

La pâle clarté d’une matinée d’hiver était rendue plus vive par la neige qui couvrait la terre et qu’un froid piquant avait congelée. Brown jeta à la hâte un regard sur la campagne qui l’entourait, afin de pouvoir reconnaître l’endroit où il se trouvait. La petite tour dont la seule voûte qui en restât formait l’horrible logement où il avait passé cette nuit remarquable, était perchée à l’extrémité d’un rocher en saillie qui dominait le ruisseau. On ne pouvait y arriver que par le ravin ou glen qui s’étendait au-dessous. Des trois autres côtés les bords étaient tellement escarpés que Brown reconnut que, le soir précédent, il avait échappé à plus d’un danger ; car s’il avait essayé de faire le tour du bâtiment, comme il en avait eu d’abord l’intention, il se serait brisé dans sa chute. Le précipice était si étroit, que dans plusieurs endroits les arbres des deux côtés opposés se touchaient. Ils étaient alors chargés de neige au lieu de feuillage, et formaient ainsi un dais de glace au-dessus du ruisseau qui coulait au fond du vallon, à travers des monceaux de neige qui donnaient à ses eaux une couleur plus sombre. Dans un endroit où le vallon était un peu plus large, et où se trouvait un espace uni entre le ruisseau et les bords escarpés de la montagne, s’élevaient les ruines du hameau où Brown s’était égaré le soir précédent. Des toits ruinés, dont l’intérieur était noirci par la fumée de la tourbe, semblaient encore plus sombres à côté des masses de neige que le vent y avait amoncelées et des glaçons dont ils étaient entourés.

Brown ne put jeter qu’un regard à la hâte sur cette scène d’hiver et de désolation, car sa conductrice, après s’être arrêtée un moment comme pour lui donner le temps de satisfaire sa curiosité, descendit à grands pas devant lui le sentier qui conduisait dans le vallon. Il conçut quelques soupçons en voyant que la vieille prenait un chemin où étaient déjà marqués quelques pas qu’il ne pouvait s’empêcher de supposer être ceux des brigands qui avaient passé la nuit dans la tour ; mais un moment de réflexion les détruisit. Il n’était pas croyable que cette femme, qui avait pu le livrer sans défense à sa troupe, aurait attendu pour consommer sa trahison qu’étant en pleins champs il eût des chances plus probables de leur échapper. D’ailleurs il était armé maintenant. Il suivit donc la