Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/20

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à un Young. C’était une femme remarquable, d’un aspect imposant, et d’une haute stature : elle avait près de six pieds. Son nez était aquilin, ses yeux perçants même dans sa vieillesse ; son épaisse chevelure tombait sur ses épaules en s’échappant de dessous un chapeau de paille à l’égyptienne ; elle portait une robe courte d’une mode bizarre, et un long bâton presque aussi grand qu’elle. Je me souviens que chaque semaine elle venait chez mon père demander l’aumône, lorsque j’étais enfant, et la vue de Madge ne m’inspirait pas peu de crainte et de terreur. Lorsqu’elle parlait avec véhémence (car elle se plaignait hautement), elle avait coutume de frapper de son bâton le plancher, et de prendre une attitude qu’il était impossible de regarder sans trouble. Elle disait qu’elle pouvait amener des parties les plus reculées de l’île des amis pour venger sa querelle, tandis qu’elle était assise tranquillement dans sa chaumière ; et elle se vantait souvent d’avoir été pendant un temps d’une plus grande importance encore, car à ses noces il y avait cinquante ânes sellés, et une quantité innombrable d’ânes sans selles. Si Jeanne Gordon a été le prototype du caractère de Meg Merrilies, je pense que Madge doit avoir posé devant l’auteur inconnu pour représenter sa personne[1]

Le lecteur a été informé de ce qu’il y a de vrai et de faux dans les conjectures de l’ingénieux correspondant du Blackwood.

Pour passer à un caractère d’un genre tout-à-fait opposé, à Dominie Sampson, le lecteur peut aisément supposer qu’un pauvre et très humble savant qui a toujours habité les hauteurs classiques, et inhabile à conduire sa barque dans le voyage de la vie, n’est pas un personnage rare dans un pays où une certaine portion de connaissances est facilement acquise par quiconque veut bien souffrir la faim et la soif pour l’amour du grec et du latin. Mais il y a un modèle plus exact du digne Dominie, sur lequel est fondé le rôle qu’il joue dans ce roman, et dont, pour certaines raisons particulières, je ne dois m’exprimer que d’une manière très générale.

Un précepteur qui ressemblait beaucoup à notre Sampson, donnait des leçons dans la famille d’un gentilhomme d’une fortune considérable. Ses jeunes élèves grandirent et entrèrent dans le monde, mais le précepteur continua de rester dans la famille, ce qui n’était pas rare autrefois en Écosse, où l’on était toujours prêt à accorder la nourriture et un abri à des amis peu fortunés et à d’anciens serviteurs. Les ancêtres du laird avaient été peu sages,

  1. Blackwood’s magazine, vol. I, p. 56. a. m.